lundi 8 juin 2015

Perdue au milieu du Pacifique - Terre de mythes - Ile de Pâques


Mon dernier article mentionnait mon passage sur un nouveau continent, l’Amérique Latine. Nous avons décidé avec Céline de faire les choses en douceur. Pour cela, nous avons choisi de continuer la vie insulaire et de ne pas quitter le Pacifique trop brutalement. Certains diraient même que nous sommes restées dans le triangle polynésien. Nous sommes certes entrées au Chili mais pas par n'importe quelle frontière. Nous avons fait escale sur l'île la plus isolée du monde: l'île de Pâques ou Rapa Nui.

Voici le récit de ces quatre jours passés en compagnie des locaux, à percer beaucoup des secrets qui entourent ce petit bout de terre. De nombreux mystères restent entiers mais les connaissances sont tout de même importantes sur cette culture presque disparue mais jamais oubliée.
En tous cas, il y a définitivement une atmosphère particulière. La magie de Rapa Nui n'est pas un mythe. Cette île semble empreinte de supers pouvoirs.

Il y a d'abord la force de la nature qui est omniprésente et vous rappelle à quel point l'homme est petit et fragile.
Des vagues énormes s'abattent en permanence sur les côtes. Le vent souffle sans cesse à en décorner les bœufs. La race bovine locale doit d'ailleurs être particulièrement solide car après vérifications, les cornes sont toujours là...
Les volcans sont présents un peu partout. L'île est en fait constituée de trois volcans principaux (Rano Kau, Terevana et Poike) et de 70 cratères secondaires. Sur une île de 164 km2, impossible de les louper. Ils sont dormants aujourd'hui mais les éruptions du passé ont laissé de nombreuses traces, notamment ces pierres plus ou moins grosses disséminées un peu partout sur l'île. Elles ne laissent aucun repos à vos chevilles en randonnée...


Il y a ensuite ces emblématiques statues, les Moaïs, sur leurs promontoires, et les pétroglyphes, ces gravures sur roche, qui sont pieds et poings liés à l'histoire de l'île. Ils nourrissent encore aujourd'hui les discussions entre archéologues, scientifiques, autochtones et autres énergumènes aux fantasmes extraterrestres.
Ce genre de site m'impressionne toujours. Tout comme devant les vestiges Mayas ou les temples d'Angkor que j'ai eu la chance de visiter ; tout comme, je l'imagine, devant les pyramides d'Egypte et le Machu Pichu péruvien, que j'espère visiter un jour ; je reste sans voix face à ce gigantisme et à toute l'ingéniosité, l'énergie et la force utilisées par ses peuples afin d'ériger de tels monuments.

Les Moaïs ne représentent aucun dieu. Elles sont en fait la représentation des ancêtres de plusieurs tribus. Dans les années 1500 environ, l'île était divisée en 7 parties égales afin de garantir une meilleure gestion des ressources de la part de chacune des tribus qui les habitaient. Chaque territoire a alors un accès à l'océan et toutes les zones se réunissent au centre de l'île où vit le roi.


A la mort de leurs chefs, les tribus commencent à leur ériger des statues. Ces statues démontrent alors l'importance des ancêtres dans la société ainsi que le pouvoir et les capacités d'organisation de chaque tribu. Plus les années, les siècles passent, plus hautes sont les statues. Des tonnes et des tonnes de ressources humaines et naturelles sont nécessaires à la construction de près de 800 Moaïs. Ils seraient d'ailleurs à l'origine de la quasi disparition de ce peuple. Un horrible cercle vicieux a réduit à néant les ressources naturelles de l'île. L'énorme forêt tropicale qui comprenait notamment les plus grands palmiers de la planète a disparu. On peut se demander ce que s'est dit le mec qui a coupé le dernier arbre...
Peu de temps après, les plantes et les animaux (comme les oiseaux) ont commencé à disparaître. Et pour finir, l'eau douce a commencé à manquer alors qu'elle se trouvait sur chacun des territoires tribaux. C'est à cette époque que les habitants ont commencé à construire des sortes de puits permettant à leurs cultures de pousser à l'abri du vent et à l'eau de pluie de s'écouler stratégiquement afin de garantir la pousse. La technique est d'ailleurs encore utilisée aujourd'hui. On trouve ces "puits" un peu partout sur l'île.

Quand une population à faim, elle commence à se battre pour survivre. Une véritable guerre civile éclate. Les statues sont détruites pour décourager l'ennemi. Les tribus commencent même à détruire leurs propres Moaïs accusant leurs ancêtres d'être responsables de la catastrophe qu'ils traversent. L'autorité du roi est remise en cause et le culte de l'homme oiseau émerge. Ce culte à pour but d'élire un nouveau chef, réduisant ainsi les pouvoirs du roi. Pour cela, chaque année au mois d'Août, les chefs de chaque tribu sont confrontés à une épreuve complexe. Ils doivent nager dans une eau infestée de requins, affronter des courants très forts, afin de rejoindre le Motu Nui sur lequel les oiseaux Manitara viennent pondre en Septembre. L'homme oiseau est celui qui ramène le premier œuf. Il est alors désigné "premier ministre" pour une année. Il semble que ce n'ait pas limité les conflits entre tribus, bien au contraire.

Quand James Cook débarque en 1774, peu de temps après le premier européen (le navigateur Néerlandais Jakob Roggeveen qui arriva le jour de Pâques (d'où le nom hehe!)), seule une statue est encore debout. Il trouve alors un peuple affamé, en pleine guerre civile. La première chose que lui réclament les habitants est du bois solide pour construire des canoës. Ils ne pouvaient même plus quitter leur île...

Toutes les statues debouts aujourd'hui, le sont donc grâce à un énorme travail de rénovation qui a commencé il y a bien longtemps.

Je ferme ici la parenthèse culturelle que je rouvrirai régulièrement plus loin dans le récit.

L'île n'est pas très grande, certes, mais en seulement quatre jours, il nous fallait une stratégie d'attaque pour tout faire et je dois dire que nous avons pas mal géré. Elle a la forme d'un triangle quasi isocèle dont les angles sont constitués des trois volcans principaux. Nous sommes quasiment parvenues à en parcourir les moindres recoins.

Ce qu'il restait de la première journée est passé extrêmement vite. Nous n'étions pas franchement fraîches après une petite nuit de 4h dans l'avion de Tahiti qui a décidé d'avoir du retard et de ne décoller qu'à 3h du matin... Avec le décalage horaire, nous sommes arrivées en milieu d'après-midi au camping Mihinoa situé sur une petite butte face au Pacifique. Nous choisissons un emplacement pour la tente en première ligne. Deux Moaïs sont là pour nous protéger. Nous ne faisons pas confiance à notre tente et privilégions le matériel du camping. Pour 70 centimes de plus, nous nous assurons ainsi de meilleures nuits. Surtout que nous le constaterons très vite, l'île de Pâques est un peu comme la Bretagne du Pacifique. Le temps y est extrêmement changeant...

Un petit tour dans la ville (comprendre le village principal) de Hanga Roa, quelques courses, seront les seules activités de la journée. Nous y verrons tout de même nos premiers Moaïs et constaterons l'omniprésence des chevaux sur le territoire. Ils sont partout, même en ville. Il n'est d'ailleurs pas rare de voir un canasson attendant son cavalier à la sortie du supermarché.





La fatigue accumulée se fait sentir puisque nous dormons douze heures cette nuit là. C'est donc le visage bien boursouflé que nous attaquons véritablement la découverte de cette île merveilleuse.

Marc, un français rencontré au camping nous recommande un loueur de vélo. Objectif du jour : s'attaquer à la côte Ouest.
Nous traversons de nouveau le village où les Moaïs et autres sculptures font partie intégrante du paysage.






Puis nous arrivons à Tahai. Cet ancien village présente de nombreux vestiges plus ou moins rénovés. 


A l'exception d'un site que nous verrons plus tard, les Moaïs sont toujours disposés dos à l'océan, tournés vers l'île et les yeux levés au ciel. Certains y voient un signe de protection quand d'autres pensent que les Moaïs semblent ainsi participer pleinement à la vie de la société. Le village étant toujours construit à leurs pieds.
Sauf erreur de rénovation, ils ne sont jamais disposés complètement à la verticale. C'est une question de centre de gravité. Le chapeau (qui est en fait leur coupe de cheveux) est placé très en avant afin de faire contrepoids.

Peu après ce site, nous faisons une halte au musée. Il était important d'y passer en début de séjour afin de comprendre ce que nous allions voir. Nous en repartons avec des tonnes de nouvelles informations tant sur l'île de Pâques que sur le peuple polynésien dont ils partagent les origines. Ils parlent d'ailleurs quasiment la même langue.
Il semblerait, en effet, que leur origine remonte aux peuples sino-vietnamiens. Ces peuples très migratoires sont peu à peu descendus vers le sud avant de s'établir pendant près de deux siècles en Papouasie Nouvelle Guinée. Après ce break, ils repartent en mer et s'établissent dans la zone des îles Salomons et Tonga. Nous sommes alors en 500 avant JC. Il leur faudra ensuite près de 700 ans pour "peupler" toutes les îles du Pacifique. D'abord Hawaï, puis la Polynésie Française et enfin l'île de Pâques et la Nouvelle Zélande.

Pour découvrir ces îles, ces marins aguerris se servaient de la nature. Tout d'abord, les oiseaux dont la présence indiquait une terre proche. Il suffisait ensuite de les suivre en fin de journée puisqu'ils regagnaient en général leurs nids. Les nuages et certaines couleurs dans le ciel étaient également des signaux importants. Enfin, la mer dont les changements de couleurs, la présence de détritus végétaux ou d'algues, indiquait aux marins la présence d'une île dans les 40 km.

Les influences polynésiennes sont encore très présentes aujourd'hui. Certains locaux réclament d'ailleurs depuis longtemps un rattachement avec la Polynésie Française...

L'île de Pâques connaît bien sûr des influences d'Amerique du Sud et ce bien avant son annexion au Chili en 1888. Il y a notamment dans ses constructions de grandes similitudes avec celles du Machu Pichu au Pérou. Certains scientifiques soupçonnent donc des contacts avec les Incas.

L'île connaît depuis des décennies un regain d'intérêt pour ses racines et un rejet plus ou moins extrême de l'autorité chilienne. Le principal problème semble être lié à l'immigration grandissante. Il est facile de comprendre que ce peuple veuille limiter le nombre d'habitants sur cette île pas si grande sachant que la folie des grandeurs de ses ancêtres a déjà failli causer sa perte. Ils veulent donc obtenir les moyens de pouvoir gérer leurs flux migratoires. Ces moyens sont aujourd'hui gérés par le Chili.
Ensuite il y a le problème de la gestion du Parc National. Ils accusent le Chili d'en conserver la majorité des recettes et de ne pas reverser suffisamment d'argent aux insulaires afin de garantir la conservation de ce site classé à l'Unesco. Nous avons eu de la chance car il y a un mois, certains contestataires ont bloqué l'accès à tous les sites touristiques pendant presqu'une semaine. Depuis, les sites ne sont plus bloqués et le nouveau moyen de pression nous arrange. En effet, les Rangers sont en grève et le parc ainsi que le musée sont entièrement gratuits !

Après cette escale hyper enrichissante dans le seul musée présent à des milliers de km à la ronde, nous poursuivons vers le nord. Nous arrivons à Ana Kakenga où des grottes assez sympas donnent accès à de véritables fenêtres sur l'océan. En revanche, mieux vaut ne pas être en surpoids si on veut y accéder...
La puissance des vagues qui s'explosent sur la falaise nous occupe un moment.











Nous passons ensuite à Ahu Tepeu ancien village où nous apercevons qq exemples de maisons en forme de bateau, des temples similaires aux Marae polynesiens mais ici appelés Ahu, ainsi que de les fameux puits qui permettent aux plantes de pousser.


Nous virons alors à l'intérieur des terres. Après une autre grotte (Ana Te Pahj) qui servait de refuge tant pour les hommes que pour les plantations, nous arrivons face aux seules 7 Moaïs tournés vers l'océan : le site d'Ahu Akivi. Ils sont impressionnants !!!



Notre parcours nous mène ensuite à Puna Pau, cratère dans lequel étaient sculptés les coiffes ou Pukao. Plusieurs exemplaires sont encore présents sur le site. Ils sont caractérisés par leur couleur rouge car ils sont faits de tuf. Les paysages sont quant à eux super apaisants, un peu comme dans la pub pour Volvic (un volcan s'éteint un être s'éveille...).
 





Sur la route du retour, nous croisons qq autres statues. Certaines sont carrément installés dans des résidences privées.


Pour finir, et comme de nombreux soirs depuis cinq mois, nous nous délectons devant le coucher de soleil qui est ce soir là particulièrement spécial.




Le lever du jour n'est pas mal non plus...

Jeudi, nous attaquons la face Nord de l'île. Celle où aucun chemin n'est indiqué sur les cartes touristiques. Après un sondage auprès de la population, de l'office du tourisme, d'un guide, de notre camping, nous n'obtenons que des informations contradictoires. Certains nous disent qu'il y en a pour 5h et recommandent grandement de prendre un guide pour éviter de nous perdre. D'autres pensent que c'est super simple et qu'une heure et demie suffit. Une guide va même jusqu'à nous dire que c'est dangereux pour deux filles de se rendre là bas. Nous pourrions nous faire attaquer par des cavaliers mécontents de notre intrusion sur ce territoire sauvage. La palme revient au passager de la voiture qui nous a pris en stop: "Vous voulez le faire à pied??? Mais pourquoi vous infliger tout ça ? Vous êtes allemandes?" Apparemment les Allemands adorent marcher... On en apprend des choses en voyage !

En tous cas difficile de prendre une décision et il est déjà tard. Nous hésitons un moment puis Céline prend le lead (il en faut toujours une!). Nous voilà donc partie en stop pour une des rares plages de l'île (il n'y en a que deux), d'où part la rando : la plage d'Anakena. Ce site est important car c'est ici que les premières populations, le roi Hotu Matua'a et son peuple, auraient débarqués autour de 500 après JC.
La plage est très jolie. Nous apprendrons le lendemain que les magnifiques cocotiers qui la bordent ont été offerts par Tahiti.



Une magnifique lignée de 5 Moaïs 3/4 est installée ici. Ils sont assez bien rénovés. Et puis il y a ce Moaï tout seul qui semble presque triste. Pourtant il devrait être fier. C'est grâce à lui que les archéologues ont découvert l'existence des yeux sur les statues. En effet, l'unique exemplaire oculaire original a été découvert au pied de ce Moaï. Il est aujourd'hui exposé au musée. Le blanc de l'œil est composé de corail et l'iris de roches volcaniques. La disparition des yeux de toutes les statues est un des grands mystères qui restent non élucidés aujourd'hui. Certains pensent que l'érosion est venue à bout du corail. Mais dans ce cas, qu'en est-il de l'iris dont la pierre est une des plus solide au monde. La guide que nous aurons le lendemain pense que les yeux ont été retirés pour une raison qu'elle ignore et qu'ils ont été cachés constituant ainsi les trésors de ses ancêtres.




Après cette halte sur la plage, nous commençons la rando à proprement parler. Nous suivons d'abord un chemin accessible en 4*4, puis progressivement le chemin rétrécit et finira même parfois par disparaître. Il nous faudra alors suivre notre instinct. Tels deux Robinson Crusoé nous retrouverons sa trace grâce aux excréments laissés par les chevaux durant leurs promenades ou à l'herbe couchée sous les pas des randonneurs. Il est, en revanche, vraiment impossible de se perdre puisque si vous n'avez pas peur de slalomer entre les roches volcaniques, il suffit de longer la côte aux pieds du volcan pour retrouver le village.

Cette balade vaut vraiment le détour. Les paysages sont incroyables : des collines immenses quasi vierges de tout arbre, recouvertes de roches, et qui se terminent sur des falaises abruptes sur la mer.
L'air est sec. Les nombreux squelettes de chevaux croisés en route nous font penser qu'ils ont du mourir de soif. Les espaces sont grands et sans points d'eau. Le vent qui souffle fort à vite fait de vous dessécher.





Nous voyons également les restes d'énormes coulées de lave et les failles béantes laissées par les précédentes éruptions dans le sol.


Et il y aussi de nombreux vestiges. Sans guide, difficile de tout comprendre. Coup de bol, au milieu du chemin nous tombons sur un campement. Les habitants nous invitent à boire un verre. Il s'agit d'un groupe d'archéologues qui travaillent sur un projet novateur d'analyse 3D des pétroglyphes. Nous apprenons que le Nord de l'île en contient beaucoup. Un des archéologues nous en fait découvrir un tout proche qui porte le symbole d'un thon. Il nous explique comment les repérer. Grâce à lui nous en trouverons plusieurs autres sur notre chemin notamment cette très belle tortue.



En à peine 4h, pause déjeuner comprise, nous atteignons Ahu Tepu que nous avions visité la veille. Nous sommes fières de nous et de notre décision de faire cette balade. Elle nous a montré un visage différent de l'île et nous a donné une bonne sensation de son isolement. Nous étions vraiment comme seules au bout du monde.

Dans un excès d'énergie, nous décidons de laisser tomber le stop et de continuer à pied jusqu'au camping que nous atteignons 2h plus tard après une pause glace au village. Nous repassons par Tahai où la lumière est bien plus belle que la veille.



Voilà une journée bien remplie vous me direz. Et bien non, ce n'est pas suffisant. Nous sommes dingues !!! A peine le temps de nous remettre de ces 25km, d'admirer le soleil qui se couche, et de manger un bout, que nous reprenons la route, à pied !!! Nous avons réservé un spectacle de danse locale.



Mais quelle bonne idée ! Tout d'abord, cela nous permet de prendre l'apéro. Et oui nous ne nous sommes pas accordé ce plaisir depuis au moins trois jours ! Ensuite, dès les premières secondes du spectacle nous savons que le moment va être agréable. En effet, des danseurs aux corps magnifiques viennent de rentrer sur scène. Ils ont pour seule tenue, non pas une feuille de vigne, mais quelques plumes bien placées. Nous passons donc une heure à nous rincer l'œil. Céline a même eu la chance de finir sur scène avec le plus beau gosse des danseurs.






Au retour, la lune est magnifique.

Nous ne pouvions quitter l'île sans une visite guidée. Nous avons certes appris beaucoup de choses au musée mais rien ne vaut les histoires d'un guide local et nous sommes super bien tombées !!! Sabrina est une descendante des rares survivants du peuple Rapa Nui. Son enfance a été bercée par les histoires de son île et elle les raconte à merveille.
Nous passons une excellente journée en sa compagnie à découvrir les incroyables sites de la côte Est.

Nous commençons par Vaihu où l'on constate le triste sort qu'ont connu les Moaïs. La guide nous explique ce qu'ils représentent et pourquoi il est interdit de monter sur leurs promontoires. Nous apprenons en effet qu'il s'agit de sépultures et que les cendres des ancêtres sont enterrées ici. Des ossements ont également été retrouvés. A priori, les peuples ont abandonné la crémation lorsque le bois est venu à manquer...

Nous prenons ensuite la route vers l'un des sites les plus majestueux à mon goût : Akahanga. Ici 15 Moaïs nous font face. Nous apprenons que les apparences sont trompeuses puisqu'une erreur a été faite lors de leur rénovation. Leur positionnement est beaucoup trop vertical. Du coup, à l'exception d'une statue impossible d'y ajouter leurs chapeaux qui ont donc été laissés en contrebas. Tout comme ce Moaï couché. Il n'a pas eu le droit au promontoire n'y appartenant pas à l'origine. Comment en être sûr ? Il est dépourvu de voûte oculaire. En effet, ces orifices étaient creusés en dernier, une fois que la statue était debout. Les yeux de corail étaient alors ajoutés, donnant ainsi l'impression que l'ancêtre était réssuscité.  







Le site suivant est mon préféré : Rano Raraku. Il s'agit du volcan dans lequel la grande majorité des Moaïs ont été taillés. L'endroit est irréel. C'est comme si d'un coup tout s'était arrêté. Les hommes auraient disparu laissant derrière eux de nombreuses statues inachevées. C'est d'ailleurs un autre grand mystère. Comment et pourquoi tout s'est arrêté ? On évoque la fin des ressources naturelles et la guerre civile qui a suivi. Certains mettent en avant les maladies, notamment la variole, amenées par les envahisseurs (comprendre les navigateurs) étrangers et qui ont décimé ces peuples isolés depuis si longtemps et dépourvus d'immunité. Il y a aussi cet épisode péruvien lorsque 1500 locaux ont été déportés et réduits en esclavages sur le continent. Seuls 15 d'entre eux rentreront mais porteurs de maladies continentales, ils décimeront un peu plus cette population déjà clairement réduite. Une estimation parle de 111 rescapés Rapa Nui suite à toutes ces "attaques". Notre guide en est la descendante tout comme de nombreux habitants de l'île. Elle nous racontera d'ailleurs que son père lui interdisait d'avoir des petits amis sur l'île. Elle ne comprendra que plus tard ce qu'il voulait dire par "il faut laver le sang". Elle l'a d'ailleurs fait puisque son mari est un chilien continental.

Revenons en à nos moutons, enfin à nos Moaïs. Sur ce site, pour la plupart, seule la tête est encore visible. Pour appréhender la taille totale de la statue, il faut alors savoir que la tête ne représente qu'un tiers. Nous sommes donc face à des géants. Le plus grand jamais trouvé est d'ailleurs au sommet, encore attaché à la montagne. Il mesure l'équivalent d'un immeuble de sept étage. Des géants je vous dis !! Ah la folie des grandeurs de l'homme.





L'avantage de ce site est qu'il présente de nombreuses étapes de la constructions du Moaï. Notre guide nous expliquera le reste.
Ils sont donc taillés directement sur la montagne, dans une position horizontale. Le tailleur s'occupe d'abord d'un premier côté, de la tête au pied. Puis il creuse la montagne au niveau de la tête et des pieds afin d'atteindre l'autre côté de la statue et de le tailler symétriquement au premier. Il creuse ensuite sous la statue laissant seulement une sorte de quille afin de soutenir le Moaï qui ressemble alors à une table. La suite est théorique mais il semble que des morceaux de bois soient glissés sous le Moaï puis remplis d'eau. Le bois se met alors à gonfler et devient assez volumineux pour soutenir la statue à son tour. Il est alors possible de supprimer la quille et de faire descendre délicatement la statue de la montagne. Elle est ensuite mise debout pour en lisser le dos.



Le transport jusqu'au site d'exposition reste Le Grand Mystère. De nombreuses théories existent. Beaucoup penchent pour différentes techniques utilisant le bois expliquant en même temps la disparition de la forêt. Tout comme pour la construction des pyramides des rondins auraient permis de faire rouler la statue jusqu'à son emplacement. D'autres pensent à des constructions de grues permettant un déplacement à la verticale. Cette derniére méthode se rapproche d'ailleurs des légendes tribales. D'après celles-ci les Moaïs marchaient. Il s'agit bien sûr de métaphores comme toutes les légendes mais il semble donc que les statues étaient déplacées debout... Mystère et boule de gomme.
La plus fantasque des méthodes évoque une aide extraterrestre permettant aux statues de léviter jusqu'au bord de mer.  Tu pousses le bouchon trop loin Maurice !

Sur cet incroyable site plein d'histoire, se trouve également un Moaï unique en son genre puisqu'il a des jambes et qu'il est à genou. La personne qui l'a découvert a eu un grave accident peu de temps après le laissant handicapé à vie et hanté par des cauchemars terribles. C'est une des raisons pour lesquels les descendants ne réalisent plus de fouilles afin de découvrir de nouveaux trésors. Ils ont peur des esprits qui habitent leur île même si des rites existent si un des leurs est amené à faire ce genre de découverte. Il faut se présenter à l'esprit afin que celui-ci s'assure que celui qui l'a découvert est bien natif de l'île. Le malheureux ne s'était semble-t-il pas présenté...


L'avant dernier site est celui du dernier Moaï debout découvert par James Cook. Il a été détruit qq années plus tard. A sa gauche, des pierres magnétiques dont la provenance reste encore inconnue à ce jour. 


Notre tour s'est terminé sur la plage d'Anakena où, comme nous l'avions déjà visitée et que nous avions quartier libre, nous nous sommes surtout accordées une bonne sieste sur le sable rose.

Après cette magnifique journée culturelle, nous avons poursuivi notre découverte par la visite d'Hanga Roa by night. Marc nous accompagne pour boire un verre. Nous descendons la rue principale. L'activité est loin de l'euphorie. Les rues sont désertes. Quelques restaurants sont animés par la présence de quelques touristes. Après 45 minutes de marche à travers le village, nous avons probablement fait le tour de tous les bars. Nous choisissons le plus animé. Un concert live vient de se terminer. Dommage ! Nous n'allons pas nous laisser abattre. Trois cocktails por favor.

Samedi. Il ne nous reste qu'une matinée et une dernière mission nous attend. L'ascension du volcan Ranau Kao, le cadet des trois. Son cratère est un cône quasi parfait dont une légère entaille laisse entrevoir la mer. Au cœur du cratère, un terrain hyper fertile où de rares plantes endémiques parviennent encore à pousser à l'abri du vent et des ravages humains.
Les pronostics donnaient l'aller retour au sommet depuis le camping en trois heures de temps. Notre navette pour l'aéroport est prévue pour 12:30-13:00. Retardée par un orage, nous ne nous mettons en route qu'à 10h mais toutes nos affaires sont prêtes. Marc, un peu inquiet, nous dit de nous dépêcher quand même. Il a fait l'ascension qq jours plus tôt. Nous nous mettons donc en mode marche rapide et il semble que les cinq mois de rando aient quelque peu payé. Nous atteignons le sommet en moins de cinquante minutes. Nous prenons un moment en haut pour admirer cette œuvre de la nature puis nous redescendons. Marc hallucine un peu quand il nous voit revenir au bout d'1h40. Ben ouais, nous étions un peu pressées ;-)




Nous n'aurions d'ailleurs pas dû. Notre vol pour Santiago est parti avec près de deux heures de retard. Décidément la LAN ne semble pas au top de la ponctualité. Cela m'a tout de même permis de rédiger ce récit détaillé mais non exaustif des merveilleuses choses que j'ai découvertes sur l'île de Pâques. Je suis ravie d'y avoir fait escale et respecte beaucoup son peuple pour ses préoccupations écologiques (comme quoi l'homme peut apprendre de ses erreurs), son respect des traditions, et les nombreux efforts qu'ils font pour partager tout ça. Quel meilleur moyen pour protéger un patrimoine (culturel et naturel) que de permettre aux étrangers de le connaître et de le comprendre ?

Nous avons depuis rejoint le continent sud américain. Nous n'avons pas vu grand chose de Santiago. Notre unique journée d'escale, nous a permis de nous poser et de discuter avec d'autres voyageurs présents dans notre auberge de jeunesse.
Nous sommes maintenant à Quito et préparons notre séjour aux Galapagos. Vous en saurez plus dans quelques jours.

Plein de bisous. 


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