lundi 14 septembre 2015

Sous terre dans les mines de Potosi, sur les traces des dinosaures à Sucre et dans une école à Tarija - quelle vie en Bolivie !


Je suis arrivée à Potosi, en compagnie d'Amélie, en fin de journée, bien cassée par les deux bus de nuit depuis l'Amazonie et les quatre jours de 4*4 jusqu'à Uyuni. 
Le soir nous ne faisons pas long feu. 

Au réveil, nous retrouvons André le Canadien rencontré à La Paz. Il s'installe dans notre dortoir. 
Pas le temps de se reposer, nous ne disposons que d'une journée pour visiter la ville minière. Après le petit déjeuner super copieux (pain beurre oeuf brouillés, fruits, pancake) nous partons en ville. Premier objectif, réserver une visite de la mine. En effet, une énorme montagne surplombe la ville, le Cerro Rico. Les incas y ont découvert des quantités astronomiques d'argent mais ne l'ont jamais exploitée. Une éruption volcanique non loin les en aurait dissuadés.  Ils y ont vu un refus de la Pachamama. 
Les espagnols en revanche ayant eu vent de l'existence de cette montagne ont tout fait pour la retrouver. Depuis, de nombreuses galeries ont été creusées et continuent à l'être aujourd'hui laissant craindre à un énorme effondrement. Malgré la surexploitation de la mine, la montagne contiendrait toujours près de 50% des réserves d'argent du monde ! On y trouve également du zinc et de l'étain. 

J'ai longuement hésité à faire cette visite trouvant l'idée un peu bizarre d'aller observer des mineurs se tuer à la tâche dans des conditions vraiment précaires. Je me suis donc renseignée afin de trouver une agence qui participe par un moyen ou un autre à améliorer leurs conditions de travail. C'est comme cela que je suis tombée sur l'agence Big Deal qui est un regroupement d'anciens mineurs qui se sont reconvertis dans le tourisme. Ils sont tous membres de coopératives et reversent une partie des revenus aux mines qu'ils font visiter. 

Nous poursuivons par une petite balade dans le quartier avant de nous rendre au musée de la monnaie qu’une guide va nous faire découvrir. Le bâtiment de style baroque est très beau. 







Le roi d'Espagne Charles III a ordonné sa construction en 1759 afin d'accueillir une nouvelle machine à frapper la monnaie qu'il a fait envoyer par bateau. Elle mettra plus d'un an à arriver à bon port et sa taille était trop grande pour être installée dans la première maison de la monnaie. Le temps de construire le nouveau bâtiment et d'assembler la machine, il faudra  20 ans pour qu'elle puisse être utilisée. Deux copies de la machine seront également réalisées, multipliant largement la production de pièces par jour. 
C'est à partir de ce moment là que les pièces deviennent vraiment rondes. Auparavant elles étaient frappées au marteau et n'avaient pas vraiment de forme. De plus, les gens avaient tendance à rogner les pièces afin de récupérer un peu d'argent. Un liseré a donc été ajouté afin d'empêcher cette pratique. 
A l'époque, la Bolivie frappait la monnaie de plusieurs pays et principalement celle de l'Espagne. Potosi était une ville très riche dont l'importance dépassait largement les frontières Américaines. Vu la quantité d'argent dont la montagne regorgeait, de nombreux objets ont été fabriqués avec ce matériel et exportés dans le monde entier. On réalisait même les invitations pour les mariages et les baptêmes avec ce précieux minerai. 
Une autre mine d'argent se trouvait en Autriche sur une montagne appelée Dollar. Les Etats-Unis ont utilisé les deux sources pour fabriquer leurs pièces. Ils ont donné le nom de la mine autrichienne à leur monnaie et quant au célèbre sigle, il s'agirait d'une partie du symbole de Potosi. Il était frappé sur les pièces provenant de la ville et consistait en la superposition des lettres P, S et I. Les US aurait conservé le S et le I créant ainsi le $ tel qu'on le connaît aujourd'hui. En cherchant à vérifier cette information, j'ai trouvé bien d'autres théories sur l'origine du $, notamment qu'il viendrait des colonnes d'Hercule. Laissons leur le bénéfice du doute... 

Les pièces boliviennes ne sont plus fabriquées en argent depuis les années 50. Comme dans la plupart des pays elles sont maintenant constituées d'acier. La Bolivie en étant dépourvue, il lui revient moins cher de faire produire sa monnaie à l'étranger. Ses pièces de 5 sont alors produites au Canada et le reste au Chili. Quant aux billets, ils sont imprimés en France !

Le musée est assez unique car il est le seul à détenir des machines à frapper aussi anciennes. On trouve donc celles envoyées par le roi d'Espagne, qui fonctionnaient avec une roue actionnée par des chevaux ou des mules. A cause de l'altitude (la ville est à 4000m) et du froid, les pauvres bêtes ne survivaient pas plus de six mois...
On trouve ensuite une machine à vapeur et enfin des machines électriques.

La visite se termine dans une salle incroyable où sont exposés les échantillons de tous les minéraux que l'on trouve en Bolivie. Certains semblent venir d'une autre planète ! D'autres sont de véritables bijoux comme cette pierre semi précieuse dont le mélange d'Améthyste et de Citrine n'existe nulle part ailleurs. On l'appelle d'ailleurs l'Amétrine ou Bolivianita. 

Il nous reste ensuite à peine le temps de déjeuner avant le départ pour la mine ! Nous sommes une douzaine à faire le tour. Cependant, nous serons les seules, avec Amélie, à prendre le guide en espagnol. Nous aurons donc droit à notre tour privé...
Première étape : la tenue. Nous voilà donc rhabillées de la tête aux pieds : pantalon, veste, ceinture, bottes, casque et même un petit sac en tulle pour mettre nos affaires. 
Nous partons ensuite pour le marché des mineurs où ils se fournissent en boissons, feuilles de coca et dynamite !! Oui oui je vous jure, elle est en vente libre... Notre guide nous raconte qu'il a acheté ses premiers bâtons à 9 ans...

Les feuilles de coca sont hyper importantes pour les mineurs. Les mâcher les aide à lutter contre le froid, leur donne de l'énergie et réduit la sensation de faim. Elle leur permet également d'avoir une notion de temps puisque les feuilles perdent leur goût au bout de 4 heures. Ils remontent alors à la surface pour préparer une nouvelle boule qu'ils glissent à l'intérieur de leur joue. 
Le temps de travail est normalement de huit heures mais il n'est pas rare qu'il fasse "la double" restant alors toute la nuit dans la montagne. 

Nous passons donc au marché des mineurs pour leur acheter quelques cadeaux. Le guide nous recommande de leur prendre de l'alcool car c'est vendredi et que le vendredi on célèbre la fin de la semaine. Je ne suis pas hyper à l'aise à l'idée de leur apporter de l'alcool à 92 degrés même si le marketing promet de belle chose... 
Je penche donc pour les feuilles de coca. 

Nous passons ensuite par une fonderie où les minéraux sont séparés de la terre avant  d'être exportés. Voici à quoi ressemble l'argent avant d'être transformé en couverts de luxe...



Après un arrêt photo, sur un beau point de vue de la ville nous atteignons une des nombreuses entrées de la mine. Une famille vit ici. Elle est en charge de la surveillance du site, nuit et jour, car il y a beaucoup de vols. Les mineurs ont tous leurs petites cases où ils entreposent leur matériel. Il faut donc les surveiller. 



La montagne, le Cerro Rico (elle porte bien son nom vu le trésor qui la compose), était surnommée la montagne qui mange les hommes. Elle a fait près de 8 millions de morts en 460 ans d'exploitation. La plupart étaient des esclaves au temps des Espagnols. Beaucoup étaient envoyés d'Afrique et ne supportaient pas les conditions de travail et le climat. Ils devaient en plus rester parfois six mois dans la mine sans en sortir. C'était la condition pour pouvoir rentrer dans leur pays. 
Et la mine continue à tuer aujourd'hui. Principale cause : la Silicose, maladie des poumons qui, à force d'avaler de la poussière, finissent par saigner. 

Il y a encore quelques années, près de 1000 enfants travaillaient dans les entrailles de la montagne pour aider leurs parents. Ils étaient parfois âgés d'à peine huit ans. Aujourd'hui, le travail infantile est interdit mais nous avons tout de même croisé un ado de 16 ans. Souvent, il s'agit d'enfants orphelins dont le père détenait une galerie. Pour ne pas la perdre et pour subvenir aux besoins de leur famille ils reprennent le travail paternel. En effet, les mineurs sont parfois indépendants mais beaucoup travaillent en coopératives. Il y a alors un chef qui, après de dures années de labeur, obtient sa propre galerie et peut alors embaucher du monde. Certains exploitent malheureusement leurs employés...

Une fois les minéraux récoltés, l'argent bien sûr mais aussi le zinc et l'étain, il faut le vendre aux fonderies. Plus le minerai est de bonne qualité, plus les mineurs obtiennent un bon prix. Certains habitants de Potosi regrettent que beaucoup des propriétaires de fonderies soient étrangers ou, quand ils sont boliviens, ne réinvestissent pas les revenus dans la ville. Potosi est souvent le théâtre de conflits sociaux. Les habitants reprochent au gouvernement de les avoir oubliés, notamment pour investir dans de nouvelles infrastructures. J'ai eu de la chance. Je suis arrivée en Bolivie après un mois de grève  générale à Potosi qui a bloqué une bonne partie du pays, la ville étant un hub assez important dans les transports. 

Nous sommes entrés dans cet énorme « gruyère » et cela n'a pas été une promenade de santé. Les galeries sont étroites et parfois extrêmement basses, nous obligeant à marcher en canard voire à ramper. Il faut escalader certaines parties. Et tout ça, à plus de 4000m, avec donc un certain manque d’oxygène. Les galeries s'enfoncent sur plusieurs km. Nous en avons visité deux. Plus on s'enfonce, plus il fait chaud et humide. Tu ajoutes à cela la poussière qui est encore plus présente lorsque les mineurs commencent à creuser à la dynamite, l'air devient irrespirable. C'est atroce. Et les détonations sont tellement effrayantes. Tu sens la montagne vibrer tout autour de toi et tu sais qu'en cas d'éboulement tu es bien trop loin pour sortir en courant. L'enfer sous terre !
Niveau émotions cela n'a pas été facile non plus. La bonne humeur permanente de notre guide et son enthousiasme ne nous ont pas empêchées de nous sentir mal à l'aise par moment. Certains groupes de mineurs n'avaient pas l'air enchanté de nous voir. D'autres ivres morts ont eu les mains baladeuses. Je me suis rarement sentie autant piégée que dans cette montagne. 
Nous avons tout de même rencontré des mineurs contents de discuter avec nous et ravis de nos cadeaux même si la plupart, habitués aux touristes, réclamaient surtout de l'alcool et paraissaient déçus lorsqu'on leur donnait de la coca. 





Après deux bonnes heures à crapahuter dans cet horrible labyrinthe, nous avons bu un coup avec le Tio. Ce diable fabriqué en terre est considéré comme le dieu protecteur de la mine et des minéraux. Chaque jour les mineurs viennent lui faire des offrandes. Il est donc recouvert de feuilles de coca et de cigarettes. Il aime également l'alcool. Nous lui en avons donc versé avant de nous enfiler une rasade à s'arracher l'œsophage. J'ai pu sentir tout l'intérieur de mes entrailles...
D'après la légende, le diable a été installé par les espagnols afin d'effrayer leurs esclaves indiens et les forcer à travailler plus et plus longtemps. Ils leur racontaient que ce "dio" allait les punir s'ils n'étaient pas plus productifs. Le son "d" n'existant pas dans la langue queshua, le "dios" est devenu "tios" puis "tio". 



En tous cas ce fut un véritable soulagement de sortir "vivant" de cet enfer !
Même si cela a été assez difficile, je ne regrette absolument pas l'expérience. Il n'y a pas mieux que de vivre les choses pour les comprendre. 

Le lendemain, André, Amélie et moi partons pour Sucre. Afin de gagner du temps nous réservons un taxi. Au final, il mettra une heure et demie à venir nous chercher...
Sucre me plaît dès notre arrivée. La ville est magnifique : toute blanche et à l'architecture précolombienne. Notre auberge est charmante avec un petit patio qui se prête parfaitement au farniente ou à l'apéro. Ce que nous ferons très tôt après une visite de la ville (dont le cimetière qui est, aussi étrange que cela puisse paraître, une des recommandations touristiques).






Sucre est aussi la ville du chocolat. Nous ne pouvions y passer sans y goûter et franchement nous avons découvert quelques merveilles notamment aux cacahuètes et aux graines de sésame. 

C'est à l'apéro que nous retrouvons Floriane et Romain que nous avons rencontrés la veille lors de notre excursion dans la mine. Un autre Français, Olivier, artiste rennais, se joint également à nous. Nous dégustons le vin bolivien vendu 3€ la bouteille à l'auberge. Seulement une bouteille sur deux est bonne mais à ce prix là on ne va pas chipoter. 
En fait, on a chipoté la première fois, manquant de créer un incident diplomatique avec le gérant. J'ai dû lui expliquer que chez nous une bouteille bouchonnée était remplacée. Il a fini par nous en offrir une autre... 

Au réveil ça pique un peu. Heureusement nous partons prendre l'air dans les montagnes boliviennes. Toujours avec mes deux canadiens, et après une copieuse salade de fruits du marché, nous partons en 4*4 en direction de Chataquila. 

La balade commence par la route des incas qui à l'époque liait Sucre à La Paz. Depuis, seul un tronçon a été conservé pour les touristes. Les paysages sont splendides : encore des montagnes colorées par les minéraux. Je ne m'en lasse pas. 




Nous reprenons ensuite la voiture pour nous rendre au cratère de Maragua. Il fait 15km et a une forme toute particulière. Ses bords forment comme des vagues stratifiées. Plusieurs théories existent. Celle d'une météorite tout d'abord. D'autres pensent qu'un ancien lac serait à l'origine de toutes ces couches de sédiments. Enfin certains l'expliquent par les mouvements tectoniques. En tous cas, c'est magnifique ! 


La rando se poursuit à travers de belles formations géologiques. Des plaques tectoniques semblent sortir de terre. Nous atteignons le but de la randonnée au bout d'1h30. Ici une plaque mis à nu par l'érosion, a conservé des traces de dinosaures vieilles de plus de 65 milliards d'années. Incroyable !










Il est ensuite déjà temps de rentrer. Nous sommes un peu déçus par le peu de temps de marche mais les paysages valaient le coup. Nous poursuivons un peu la marche dans la ville puis retrouvons Flo et Romain. Notre mission du jour: dégoter  de quoi faire une fondue. Oui oui vous avez bien lu une fondue en Bolivie !! Nous avons trouvé trois sortes de fromage et un petit vin blanc. La maïzena était déjà en possession des Français. Le tour était joué. Au final le plus délicat a été le pain qui partait complètement en morceaux lorsqu'on le trempait dans le fromage. Cela n'égalait bien évidemment pas la fondue Suisse (car rien ne peut l'égaler !) mais cela nous a tout de même rappelé de bons souvenirs. 


Pour notre dernier jour à Sucre, nous visitons une autre partie de la ville dont le parc Bolivar où se trouve une mini tour Eiffel qui aurait été construite par Monsieur Eiffel lui même ! 





Puis nous partons en direction du musée des dinosaures. En effet, à dix minutes du centre ville se trouve le plus grand mur d'empreintes du monde. Il a été découvert par hasard dans l'enceinte d'une cimenterie. Il s'est avéré que l'endroit où se trouvent les empreintes était recouvert d'un sable de mauvaise qualité. Ils ont donc cessé de creuser dans la montagne. L'érosion a fait le reste. Des pans de montagne ont commencé à s'effondrer, laissant apparaître les premières empreintes il y a quelques années. Il y en a aujourd'hui près de 10000 visibles et bien d'autres encore enfouies sous plusieurs couches de sédiments. 
A l'époque, il s'agissait d'une plaine recouverte d'eau peu profonde. Ici des milliers de dinosaures passaient pour se rendre vers le Sud. Une véritable autoroute à dino !
Le mur est aujourd'hui à la verticale suite à la création des Andes, les mouvements tectoniques ont séparé la plaine en deux, créant une sorte de V. Le mur est une des branches du V. D'autres traces sont certainement cachées sur l'autre versant de la montagne. On y trouve déjà de nombreux fossiles d'algues. 


La visite commence par un documentaire expliquant les difficultés qu'ont dû connaître les dinosaures dans la région à cause de la forte activité volcanique dont les émanations toxiques ont tué de nombreux spécimens. 

On passe ensuite dans un parc où des reproductions de dinosaures permettent de se rendre compte de leur taille. 






La dernière heure est consacrée au mur. Nous revêtons un casque de chantier et nous approchons au plus près de cette énorme  façade recouverte de traces de pas. Incroyable !






La journée se termine à l'hostel. André nous quitte en premier. Il part pour Santa Cruz. Puis c'est à mon tour de partir. Amélie vient avec moi au terminal de bus. Son bus ne part qu'une demi-heure après moi. Nous passons nos derniers instants à déguster des sandwichs à l'avocat (fait maison cette fois-ci) que nous aimons tant puis il est temps de se dire au revoir. 
Merci Amélie pour ces trois semaines superbes en ta compagnie. Quelle bonne surprise de t'avoir recroisée par hasard. Nous nous retrouvons bientôt en Suisse pour de nouvelles aventures ! Tabernacle !


Je me suis ensuite installée à Tarija. Pour la première fois depuis janvier, je me suis posée deux semaines au même endroit et cela fait du bien !
J'y suis arrivée à 6h du matin par bus de nuit. Ne sachant pas à quelle heure ouvrait l'école, j'ai passé un moment à la gare routière à discuter avec quelques rares voyageurs. Ici, très peu de tourisme. Seuls ceux qui remontent ou se rendent en Argentine font parfois une escale. 
Nous sommes pourtant dans la région viticole de la Bolivie. Je vous jure que c'est un hasard si l'école que j'ai trouvée pour faire du bénévolat se trouve ici ;-)

Lorsque j'arrive à l'école à 7h15, seule la cuisinière est présente. Je peux alors découvrir les locaux avant que les élèves n'arrivent. L'endroit est super. Il y a de l'herbe, des fleurs et des petites maisons (les salles de cours) reliées les unes aux autres par des petits chemins. 


Le directeur arrive peu de temps après et m'emmène dans la splendide maison qui va être la mienne pendant mon séjour. Elle se trouve au milieu d'un grand jardin et est pourvue d'une belle terrasse. 
Je vais la partager avec d'autres volontaires : Jean-François, ainsi que Susanna, Mathieu et leurs trois enfants Noé, Lina et Luca. Ici tout le monde est Suisse. Pour cause, l'école a été créée par une suissesse il y a quinze ans pour venir en aide aux enfants défavorisés et particulièrement ceux qui ont des problèmes de comportements ou des retards scolaires. Aujourd'hui c'est un doux mélange d'enfants avec ou sans problèmes particuliers. Chacun peut aller à son rythme et l'entraide est super forte entre les uns et les autres. 

Lorsque le directeur ouvre la porte de ma chambre Jean-François est encore couché. Il est pourtant plus de 8h. Petite panne de réveil peut-être ? Sa soirée de la veille a été festive à priori. Cela donne le ton pour de mon séjour ici. On ne va pas s'ennuyer...

Une fois installée, je retourne à l'école et le directeur m'assigne à la classe des "segundarios". Ils ont entre sept et huit ans. Je vais assister leur maîtresse Paola pendant les heures de cours et tout particulièrement aider ceux qui ont le plus de mal. 
Les enfants me font un super accueil. Certains me sautent dans les bras, d'autres m'apportent une chaise. Ils m'appellent "profé" et veulent tous que je les aide. C'est super chou. 





En revanche, dès la première journée je constate que Paola est la seule à réellement parvenir à les tenir. Dès qu'il y a des profs extérieurs, ces petits anges se transforment en monstres, notamment avec ce pauvre remplaçant du prof de musique qui a juste vécu l'enfer pendant une heure. Impossible de calmer les élèves qui sautaient, criaient, faisaient voler des avions en papier et allaient même jusqu'à arracher le stylo des mains du prof. J'ai halluciné. 
Je me suis alors demandée à quelle sauce  j'allais être mangée lorsque Paola m'a sollicitée dès le troisième jour, pour leur donner un cours d'anglais, toute seule. Au final, j'ai réussi à capter leur attention. Paola est arrivée au milieu de l'heure et n'a quasiment pas eu à intervenir. J'étais bien contente, surtout que je n'étais pas très fraîche ayant été embarquée par Jean-François la veille au soir pour sortir avec ses amis Boliviens. J'ai alors découvert leur eau de vie local, le Singani, qu'ils prennent en cocktail avec du Sprite, et leurs soirées karaoké qui se passent dans des espèces de mini boîtes de nuit. Voilà comment je me suis retrouvée dès mon troisième jour de "boulot" avec une bonne gueule de bois...

A part cette journée difficile, la première semaine s'est bien passée. J'ai découvert le difficile métier d'instituteur qui demande une bonne dose de patience et une certaine capacité d'abstraction pour notamment gérer le niveau de bruit. Je suis sortie chaque jour épuisée mais heureuse de pouvoir apporter un peu de soutien et d'amour à ses enfants qui en manquent pour la plupart beaucoup. 


Chaque soir je suis également contente de retrouver une sorte de cocon familial ainsi qu'une maison où je peux prendre mes habitudes, ranger mes affaires hors de mon sac à dos !!!, profiter de la terrasse et jouer aux cartes avec mes nouveaux collocs. Des plaisirs simples...



Le week-end est vite arrivé. Le vendredi soir c'est Peña. Ces soirées folkloriques sont appréciées des locaux. Nous étions d'ailleurs, avec Jean-François, les deux seuls touristes. Ici l'alcool coule à flot au son (hyper fort!) des voix incroyables des chanteurs typiques. La musique ressemble à celle des Mariachis mexicains. De nombreux instruments sont utilisés : violons, tambours, basse, guitare, batterie. J'ai adoré. C'est Melina, l'amie bolivienne de Jean-François, qui nous a proposé cette soirée. Nous y avons rejoint deux couples d'amis à elle. Le mot le plus prononcé de la soirée aura été "salud" ("santé"). Impossible de boire une gorgée sans trinquer et interdit de passer plus de cinq minutes sans prendre une gorgée. Sacré rythme ! Finalement l'entraînement alcoolique d'école de commerce peut servir parfois ;-) 
L'ambiance est superbe. On nous apprend les danses typiques de la cille de Tarija telles que la Chacarera et la Cueca dans laquelle il faut faire tourner les serviettes comme dans la chanson de Patrick Sebastien... 
Il s'agit en fait de la danse du coq qui tourne autour de sa poule. La serviette représente le mouvement des plumes lorsqu'ils se font la cour.  
En fin de soirée, sur demande du patron, je me retrouve à chanter la Marseillaise en duo avec lui. Quelle soirée ! 




Le lendemain, je suis bien contente de pouvoir faire la grasse matinée. Je pars me balader en ville. Le temps est à la grisaille. Je n'ai donc pas pris trop de photo mais j'ai fait le tour des marchés et des places principales. La ville est vraiment sympa. L'atmosphère y est détendue et les gens sont souriants. Ici aussi on peut faire des selfies et discuter avec des zèbres !







Dimanche nous sommes invités à déjeuner chez des amis boliviens de Susanna et Mathieu. Impossible de mourir de faim chez les boliviens. Nous avons droit à un véritable festin dont un délicieux poisson au barbecue. En fin de repas, nous ouvrons quelques bouteilles et buvons à la bolivienne : les uns après les autres, nous nous invitons à boire dans le même verre. Une sorte de verre de l'amitié que tu proposes en levant ton verre en regardant la personne que tu souhaites inviter à boire. Il ne faut juste pas avoir peur des échanges de microbes, c'est bon pour les anticorps !
Le dimanche se termine par une bonne balade digestive. 

La deuxième semaine passe à une vitesse fulgurante. Je connais maintenant le nom de mes élèves. Ils ne sont pas faciles tous les jours mais l'on s'attache vite à ces petites choses. Je m'occupe en particulier de Claudia, Bryan et Mauricio. Ils ont chacun leur histoire et leurs difficultés. Même s'ils mettent souvent ma patience au défi, je fais tout pour ne pas m'emporter et leur apporter un maximum de soutien. Ils me le rendent bien. Tous les matins, j'ai droit à des gros câlins. Je retombe en enfance en jouant à la balançoire et au loup. Bref je partage des moments superbes avec Jennifer, Angel, Isabel, Mario, Yerry, Sahid, Darling, Cecilia, John, Pedro, Ellias...
D'autres enfants de l'école me marquent également. Comme la petite Talila qui doit être la plus turbulente de sa classe mais dont l'histoire et le petit visage d'ange ne laisse pas indifférent. 





Cette expérience a été super enrichissante et m'a permis de réaliser encore plus à quel point le métier d'instituteur est exigeant et difficile. Je ne pense pas pouvoir faire cela toute ma vie. En revanche, c'était chouette de donner un coup de main, encore plus à Paola qui est une maîtresse exceptionnelle. Et pourquoi ne pas renouveler l'expérience une prochaine fois. 
Ces enfants ont besoin de notre aide même pour quelques semaines. Aucune expérience particulière n'est requise seulement de la motivation et beaucoup d'amour. Amis volontaires n'hésitez donc pas à venir donner un coup de main dans cette belle école qu'est Creciendo ! 


La semaine s'est conclue sur un défilé dans le centre ville. Pour l'occasion, Paola et moi avons confectionné de beaux costumes de Mickey et Mini pour nos élèves. Je me suis éclatée à fabriquer 26 paires d'oreilles. Les enfants étaient contents. C'était beau de les voir s'amuser, danser et observer la ville en la parcourant. 





Enfin pour mon départ, j'ai eu droit à de délicieuses Salteñas (spécialité d'origine argentine consistant en un feuilleté de viande, oeuf et légumes) offertes par la direction. Tous les profs étaient présents et nous avons partagé un moment le temps de la récréation. Merci à Gustavo le directeur et à Shirley pour cette gentille attention. 


En plus de cette semaine hyper enrichissante quel bonheur de rentrer chaque soir à la maison et de retrouver une ambiance familiale et chaleureuse. Quel plaisir également de retrouver un peu de Suisse. 

Le dernier week-end en Bolivie a commencé par une belle soirée. Nous sommes retournés à la Peña. Susanna et Mathieu se sont joints à nous cette fois-ci. Nous avons dansé comme des fous sur les rythmes traditionnels, goûté le délicieux Pique Macho (plat épicé à base de bœuf, de chorizo et de frites), cassé quelques verres et terminé la soirée chez un ami de Mélina. 

Le samedi est calme. Je profite un peu de la maison, du hamac et du jardin. Cedric, un nouveau volontaire, débarque sans crier gare. Nous lui faisons un peu de place. 

Dimanche c'est randonnée. Nous partons avec Cedric, Jean-François et Melina. Marco, un italien installé à Tarija depuis un moment, nous emmène pique-niquer au bord de la cascade Chorro de Marquiri. Elle est située à une heure de bus au Nord de Tarija près de San Lorenzo, un village super mignon qui produit le pain de toute la région. 
Le départ est tardif car il faut attendre les Boliviens du groupe qui arriveront avec une petite heure et demie de retard. Heureusement que nous ne nous sommes pas privés de profiter du beau temps en passant par le dernier né des miradors de la ville. Une espèce de coupe en verre surplombe la ville et notre quartier. Des peintures sur Tarija sont exposées tout autour. 





A part ce petit contre temps, la journée est superbe. La cascade se trouve au coeur d'un magnifique canyon où volent les hirondelles. 
Au retour nous décidons de rentrer par la rivière avec des passages qui se rapprochent plus de l'escalade que de la randonnée. 













De retour à la maison, on m'indique qu'il m'est interdit de rentrer dans la cuisine. Les enfants m'ont préparé un dîner de départ. Trop chou !! Guacamole, gratin de pâtes Suisse Allemand et gâteau à la crème, le tout accompagné de vin bolivien et chilien. Un repas léger tout comme les blagues qui accompagneront cette belle soirée ;-)

Ces deux semaines m'ont fait le plus grand bien. Nous avons beaucoup trop mangé et beaucoup trop bu mais qu'est ce que c'était bon ! Merci à Susanne, Lina, Mateo, Noé, Luca et Jean-François pour ces belles soirées, pour les bons petits plats notamment ces spécialités helvétiques que vous m'avez fait découvrir, pour les dimanches pancakes, pour les belles discussions, pour les nouveaux jeux de cartes, pour les soirées fromage pinard (même si on a mis le temps à trouver le bon fromage ;-), pour les vans, pour les masques à l'argile, pour les bonnes tranches de rigolades et surtout pour votre gentillesse et grande générosité. Vivement les retrouvailles en Suisse. 

Je quitte maintenant la Bolivie. Ce pays m'aura marqué tant par la beauté et la diversité de ses paysages, que par la richesse de sa culture et de son histoire. J'y ai rencontré des gens exceptionnels que j'espère bien retrouver à mon retour. Enfin l'on m'avait dit que niveau bouffe la Bolivie n'avait rien d'exceptionnel, je me souviendrai pourtant de sa délicieuse sopa de mani (cacahouètes), du saice (viande hachée épicée), des avocats si savoureux, des jus de fruits frais, de tous les bons petits plats de la cuisinière de Creciendo et bien sûr du vin de Tarija. 

Il me reste maintenant deux mois pour découvrir les deux derniers pays de mon périple. À moi l'Argentine et le Chili !!!

Plein de bisous. 

Photos: 

1 commentaire:

  1. Finis bien ce beau voyage et retrouve ta maman à buenos Aires... Elle est impatiente . Bisous.

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