lundi 3 août 2015

Merveilles péruviennes : dunes d'Ica, lignes de Nazca et vallée sacrée jusqu'au Machu Picchu


Au petit matin lundi, me voici de retour dans un bus. Je ne compte plus les heures. J'aime regarder les paysages qui défilent par la fenêtre. Le trajet longe la côte vers le sud entre Lima et Ica. Encore et toujours le désert comme sur toute la côte péruvienne depuis l'Equateur. 

A Ica, je saute dans un taxi en direction de Huacachina, véritable oasis au milieu d'incroyables dunes de sable. Ici la spécialité locale consiste à dévaler les dunes dans de gros buggys avant de s'essayer au sandboard ou surf de sable. Sensations fortes garanties, tout comme les bleus un peu partout sur le corps... Malgré 30 ans de ski à mon actif, je me suis pris de bonnes gamelles. Il faut dire que les fixations ne sont rien d'autre que des bandes de scratch qui ne tiennent pas vraiment vos pieds. J'ai fini par descendre sur le ventre, moins dangereux et tout aussi fort en adrénaline. 
Quant au buggy, les chauffeurs sont de véritables enfants qui s'amusent avec leur joujou à vous faire peur en prenant les pentes les plus raides et les virages les plus serrés. J'avais l'impression d'être dans un jeu vidéo. 







Le soir, avec mes nouveaux potes de buggy (nous étions une petite dizaine), nous profitons du barbec organisé par l'hôtel pour nous en mettre plein la panse. Fait incroyable, il n'y avait pas de riz au menu, vous savez, ce féculent que je mange midi et soir depuis sept mois... J'ai savouré/dévoré le buffet de salade. Le tout arrosé au Pisco bien sûr. 

Mardi, en route pour Nazca et ses mystérieuses lignes aussi appelées géoglyphes. Je demande d'abord au chauffeur de bus de me laisser devant le musée Maria Reiche. Cette mathématicienne allemande s'est passionnée et a dédié sa vie aux lignes de Nazca. Selon elle, les géoglyphes formeraient un immense calendrier astronomique, dont les lignes pointent vers des étoiles ou des constellations et correspondent à des dates importantes dans le calendrier agraire (semailles, récoltes).
Il existe de nombreuses théories autour de ces lignes. Beaucoup s'accordent à dire qu'il s'agirait d'un temple à ciel ouvert dédié aux dieux afin qu'ils apportent l'eau et la fertilité au peuple Nazca. Il semble qu'une longue période de sécheresse ait frappé cette civilisation. De nombreux sacrifices humains notamment d'enfants ont alors été réalisés afin d'amadouer les dieux. 

Le musée n'apporte pas beaucoup d'information. L'on y voit simplement de belles photos aériennes des lignes, la chambre de Maria Reiche et des objets de l'époque de la civilisation Nazca, dont cette étrange momie assise au milieu d'une pièce. Elle est super bien conservée. L'on distingue clairement des tatouages sur sa peau. Il devait s'agir de quelqu'un d'important car la momification était réservée aux chefs. 




Alors que j'attends le bus pour continuer mon chemin, une voiture pleine à craquer s'arrête. Geofrey, le conducteur, propose de me déposer au mirador un peu plus loin, de m'attendre pendant que j'observe les lignes puis de m'emmener à Nazca. Il travaille en fait pour une agence touristique. Il est tellement drôle et sympa que j'accepte de visiter la ville avec lui. 
Je me glisse donc sur la banquette arrière aux côtés de trois autres péruviens. Et c'est parti !

Le mirador est un simple promontoire en métal de quelques dizaines de mètres de haut. Le mieux est évidemment de survoler les lignes en avion mais le prix de la demi heure de vol m'a un peu refroidie. D'ici, l'on aperçoit déjà clairement deux géoglyphes. Je monte donc et découvre les dessins si bien préservés de "l'arbre" et "des mains". Je vois également des lignes qui partent en direction des montagnes. Ce qui est incroyable c'est que ces dessins ont quasiment deux siècles. Ils ont été réalisés en ôtant une couche de 3-4 cm de pierres sombres du sol laissant place à une sous couche beaucoup plus claire. Les pierres ramassées étaient alors déposées sur le côté afin de créer un petit muret et protéger ainsi les dessins du vent. Une autre technique consistait à nettoyer la zone du dessin et à entasser les cailloux en leur donnant la forme désirée. 
Le peu de pluie et de vent ont permis de préserver le tout quasi intact. Incroyable !


La suite de la visite se fait en compagnie d'un israélien que Geofrey, en bon vendeur, à dégoté en route. Tant mieux pour moi cela me permet de réduire le prix du tour et de rencontrer du monde. Le chanceux va survoler les lignes. Nous l'emmenons donc à l'aéroport. En l'attendant, j'ai droit à un documentaire de National Geographic hyper intéressant sur le peuple Nazca et ses lignes. J'y apprends leurs difficiles conditions de vie dans l'environnement ultra sec du désert et leurs rites qui nous paraissent complètement fous pour obtenir des dieux eau et fertilité. Nombreux sont morts en construisant les lignes. D'autres se sont portés volontaires au sacrifice pour aider leur peuple. Seules les têtes des sacrifiés ont été retrouvées. Aucune trace du reste...

Certainement par gentillesse, l'israélien me dit que vu d'en haut, les géoglyphes sont tout petits et qu'à part les sensations fortes, cela ne vaut pas vraiment le coup. Il me montre quand même de belles photos prises du ciel. Pas de regret, j'ai déjà vu tellement de belles choses ces sept derniers mois et de nombreuses autres m'attendent... Notamment ces incroyables aqueducs fabriqués par les Nazcas pour récupérer l'eau. Contrairement à chez nous, ils sont creusés dans le sol et des sortes de puits en colimaçon permettent d'accéder à l'eau ou d'aérer les canaux. Le pierres sont disposées les unes sur les autres sans ciment protégeant l'ensemble des secousses sismiques. Un puits a été construit à la jonction du canal arrivant de la montagne et de celui arrivant de la rivière. Un troisième canal part en direction de la ville. Ce système d'irrigation judicieux est encore utilisé aujourd'hui. 
En fond, derrière une chaîne de montagnes, on peut apercevoir la plus haute dune du monde, le Cerro Blanco qui culmine à 2078m.





Nous partons ensuite visiter des ruines Incas cette fois. Ils ont conquis les Nazcas déjà affaiblis par la sécheresse, et intégré leurs connaissances, notamment agricoles, astrologiques et architecturales. Le site que nous visitons était un centre administratif. Les couleurs du coucher du soleil se marient parfaitement avec les pierres certainement polies à la main. 



La visite se termine par un cours de poterie donné par (soi-disant) la seule famille péruvienne qui pratique la méthode ancestrale pour fabriquer et peindre des objets en céramique. Les poils des pinceaux sont en cheveux de nourrissons. Certains sont originaux et en superbe état de conservation. Pour polir les pots, une pierre volcanique frottée sur la peau afin de récupérer la graisse naturelle suffit. La couleur est produite à partir de minerais naturels. Une nuit dans un four creusé dans le sol et c'est prêt, régalez vous ;-)



Il est ensuite temps de prendre mon bus de nuit pour Cuzco. 14h de trajet, autant les passer à (essayer de) dormir. 
A l'arrivée, Raoul m'attend, un autre ami de Jeanine (ma cousine péruvienne ;-), qui m'accueille gentiment pour mes quelques jours à Cuzco. Je m'installe donc dans un apparte. La classe !
Après le déjeuner, je rejoins Clément, un pote de l'Edhec en vacances au Perou. Il s'est avéré que nous arrivions par pur hasard en même temps dans la cité Inca. Nous partons donc à trois, avec son ami François, faire la tournée non pas des bars mais des cathédrales et autres églises vestiges de la conquête espagnole sur l'empire Inca. De nombreux sites ont été détruits et les pierres réutilisées pour affirmer leur pouvoir sur le peuple conquis. 
La place d'armes est très jolie. Encore plus de nuit lorsqu'elle est illuminée. 


J'aime beaucoup Cuzco. Il y règne une atmosphère toute particulière. On s'y sent bien malgré la quantité de touristes. Nous nous perdons dans les ruelles tout en escaliers et découvrons plein de petits quartiers sympathiques. 






Puis vient l'heure de l'apéro et celle de nous quitter déjà. Chacun part tôt le lendemain à l'assaut du mythique Machu Picchu. Clément et François ont pris l'option trek de 5 jours. J'ai choisi l'option semi-véhiculée de trois jours. Bientôt un nouveau rêve va se réaliser...
Je rejoins Raoul et sa maman pour le dîner puis pars me coucher surexcitée à l'idée de ce qu'il m'attend. 

Un bus de quinze personnes me récupère place d'armes. Chiliens, Mexicains et Brésiliens, je suis la seule Européenne pour une fois. Il y a six heures de route jusqu'à Hydroelectrica, station de train située au pied de la montagne Machu Picchu (oui ce n'est pas qu'un temple). La route est belle. Nous croisons des ruines Incas au milieu de montagnes verdoyantes et sur fond de sommets enneigés. Notamment le site d'Ollantaytambo, où se serait réfugié Manco Inca suite à la prise de Cuzco par les espagnols. Un avant goût avant l'apothéose. 





Un accident vient gâcher la fête. Un minibus a fait une chute de 3-4m et s'est retourné sur le bas côté de la route. Nous descendons pour donner les premiers secours avec le peu qu'on a dans nos pharmacies de voyage. Le chauffeur est en piteux état. Les touristes à bord me racontent qu'il conduisait comme un débile et qu'ils lui ont demandé de ralentir à plusieurs reprises. Ils sont choqués mais les blessures semblent légères à part peut-être cette fille qui s'est sûrement cassé la clavicule et une autre dont le bras a une drôle de forme. Les secours arrivent au bout de quelques minutes. Nous leur passons le relais et reprenons la route en silence. Notre chauffeur est très prudent depuis le début du voyage. Nous nous sentons en sécurité. Il reçoit de nombreux coup de fil. Le bouche à oreille va vite. Ses proches s'assurent qu'il n'est pas le chauffeur blessé. 
Nous arrivons à Hydroelectrica après la pause déjeuner. Nous sommes des centaines à arriver en même temps. C'est un chaos organisé. Une personne nous indique qu'il nous suffit maintenant de marcher pendant deux/trois heures en longeant la voie ferrée jusqu'à Aguas Calientes d'où partent les voies pour le Machu Picchu. C'est parti pour 11km de marche longeant une magnifique rivière au milieu de la forêt. Je ne le sais pas encore mais les ruines que j'aperçois au sommet des montagnes environnantes ne sont autres que celle du Saint Graal Machu Picchu. 



J'ai un bon rythme. En deux heures, j'arrive à destination. Aguas Calientes est encaissée dans la vallée et traversée par la rivière Vilcabamba que je viens de longer. Je retrouve un gentil organisateur sur la place principale qui m'indique l'hostel où je dois passer la nuit. Je me retrouve dans une chambre de 4 avec deux hollandaises et une brésilienne. Un petit tour au marché pour gérer le déjeuner du lendemain, nous sommes ensuite une cinquantaine à nous retrouver pour dîner et pour un brief des organisateurs. C'est que c'est tout un programme. 

Vendredi le réveil sonne à 4h pour un petit déjeuner (sans café !!) à 4:15. À la demie je décolle avec mes nouvelles collocs pour l'ascension du Machu Picchu. Nous sommes nombreux à nous être levés aux aurores. Une première file d'attente de 20minutes nous attend à l'entrée du chemin. C'est râpé pour le lever de soleil... A 5h10 nous commençons à grimper, à la lumière de la lampe frontale, les 800 marches jusqu'aux portes de la ville impériale. Le soleil se lève pendant l'ascension et la magie commence déjà à opérer. Les montagnes environnantes sont splendides. La végétation pousse même sur des falaises abruptes apportant des touches de couleurs rouges et grises au paysage verdoyant. 

A 6h05 c'est le sommet. Deuxième file d'attente à l'entrée du site. Ça se mérite le Machu Picchu! 

De l'autre côté un guide nous attend. Il faut alors attendre une bonne vingtaine de minutes que tous les gens du groupe soient arrivés. Je prends mon mal en patience. J'ai toute la journée devant moi après tout. 
La visite est sympa. Le guide est passionné. Il ne cesse de nous répéter à quel point la civilisation Inca est une fusion de plusieurs civilisations. Un mélange de cultures et de connaissances acquises au fur et à mesure des conquêtes et des alliances. 
La civilisation est née dans le bassin de Cuzco vers le XIIIe siècle. A son apogée, elle s'étendait du sud de la Colombie au Chili en passant par l'Equateur, le Perou et la Bolivie. 

L'empereur Pachacútec a fait construire le Machu Picchu au XVe. L'idée était d'avoir une résidence pour se reposer. Certaines constructions font penser à un sanctuaire religieux. Il a fallu près de 70 ans pour le bâtir avec entre 20 et 40000 ouvriers selon les périodes. Entre 300 et 1000 personnalités religieuses et politiques vivaient ici. Le site n'a en fait jamais été terminé et fut abandonné lors de l'effondrement de l'empire. La ville a ensuite été oubliée pendant des siècles, les colonisateurs espagnols ne s'étant jamais rendus aussi loin dans les Andes pour piller et détruire le Machu Picchu, comme ils ont pu le faire pour d'autres sites. Seuls les paysans locaux en connaissaient l'existence. C'est un archéologue américain, professeur d'histoire de l'Amérique latine à Yale, qui en a révélé l'existence au monde entier au début du XXe. 

Lors de la visite guidée, je réalise d'autant plus à quel point les incas étaient brillants. Adorateurs des montagnes qu'ils considéraient comme leurs dieux, ils ont placé Machu Picchu 
sur un promontoire rocheux qui unit les monts Machu Picchu ("vieille montagne" en quechua) et Huayna Picchu (jeune montagne). Ils disposaient de connaissances profondes d’astronomie et physique. Au cœur du site, une roche en forme de table est disposée. Il s'agit de l'Intihuatana. Les quatre angles visent parfaitement les points cardinaux. Le guide nous l'a prouvé en posant un IPhone en mode boussole dessus. Cette pierre est la pièce centrale et la plus importante du système complexe de mesures astronomiques déterminant les dates de début et fin des campagnes agricoles. Elle était également utilisée comme autel rituel. 

Le temple du soleil permet d'indiquer les solstices et les équinoxes.

Le système d'irrigation est lui aussi perfectionné afin de conduire l'eau des montagnes sur toutes les zones agricoles et urbaines. 

On trouve également de nombreux symboles religieux dont ces incroyables représentations des montagnes environnantes. 



Il y a aussi ce condor dont le corps et la tête sont sculptés au sol et les ailes représentées par deux énormes blocs rocheux. L'animal constitue un des trois animaux sacrés Incas avec le serpent et le puma. 

Le guide termine sa visite par une séance de méditation de cinq minutes durant lesquelles, assis en tailleur face aux montagnes, nous gardons les yeux fermés. Lorsque nous les rouvrons tout est bleu autour de nous. Magique !

Il n'est que neuf heures. Le site est plein à craquer. Mon billet me donne accès à la montagne Pichu jusqu'à onze heures. Je décide donc de prendre de la hauteur. Je commence l'ascension avec une irlandaise. Non acclimatée à l'altitude, elle n'atteindra jamais le sommet. Je continue ma route avec une islandaise Eygló avec qui je sympathise tout en admirant les paysage. Le chemin est étroit et vertigineux. Après une heure de montée assez raide nous atteignons le sommet. Le jeu en valait la chandelle. C'est tout simplement époustouflant. D'ici, l'on aperçoit clairement le Machu Picchu au centre d'une merveilleuse chaîne montagneuse dont certains sommets sont enneigés. Nous restons là un moment et réalisons quelques photos plus ou moins vertigineuses. Le gardien n'a pas trop apprécié mon équilibre à 3000m !
C'est ici que je retrouve par hasard les deux frangins canadiens rencontrés un mois plus tôt un peu plus haut dans les Andes équatoriennes. Le monde des voyageurs est tout petit. 







Pour une nouvelle prise de vue, je me rends ensuite vers la porte du soleil. C'est par ici que les Incas entraient à l'époque après avoir parcouru des centaines, voire des milliers de km à travers les Andes sur la fameuse route des Incas.
La vue d'ici n'est pas mal non plus...




Puis je pars à l'autre bout du site où se trouve le pont inca qui garde l'accès à l'ouest. 
Le passage est condamné pour des raisons de sécurité compréhensibles lorsque l'on voit la largeur du passage... En chemin, je saisis les rayons du soleil qui joue avec le Machu Picchu. 


Il est ensuite temps de prendre une pause. Je m'installe donc un moment sur une des terrasses avec une nouvelle vue imprenable sur le Machu Picchu. Je profite à fond de ce moment. Je n'en reviens pas d'être ici !


Il est quinze heures. Le site commence à se vider. Je décide de refaire un tour dans la zone urbaine qui est beaucoup plus calme que le matin. J'y croise des lamas et un viscache (sorte de lapin à queue d'écureuil). Je ne veux pas partir, je continue à crapahuter à travers les ruines. Avant la fermeture, je m'assois une dernière fois depuis la maison du gardien placée tout en haut des terrasses. Une américaine me demande si je veux une photo car la situation l'a inspirée. L'image est pas mal en effet ;-)














Les sifflets des gardiens nous indiquent qu'il est temps de partir. Les derniers clichés sont réalisés avec nostalgie. 

Alors que j'ai crapahuté toute la journée, je déborde d'énergie. Je dévale les 800 marches de retour en un temps record. Je suis en symbiose avec la montagne Machu Picchu ! Je remonte la rivière Vilcabamba et me voici de retour à Aguas Calientes. 

A mon hostel, j'apprends que mon lit a été donné à quelqu'un d'autre. Je retrouve mes affaires dans un sac à la réception. Pas de problème, en attendant qu'on me trouve un nouveau lit, je file aux bains thermaux (et oui, il faut bien que le nom Aguas Calientes viennent de quelque part). 
Il y a plusieurs bains. Certains sont vides, les plus frais... D'autres sont bondés, principalement de locaux, qui bavardent en prenant l'apéro. C'est là que l'eau est la plus chaude mais aussi la plus marron... Impossible de savoir si c'est de crasse ou naturel. Je fais abstraction et teste plusieurs bains jusqu'au plus chaud où je me trouve une petite place tant bien que mal et m'accorde une bière pour célébrer cette incroyable journée. 
A mon retour à l'hôtel, un lit m'attend dans une chambre que je partage avec d'eux américains. La bonne nouvelle est qu'ils ont eux aussi fait le Machu Picchu. Nous allons donc pouvoir dormir le lendemain matin. 

Enfin... C'est sans compter sur mon réveil naturel qui depuis sept mois se fait aux alentours de 6h... Je m'accorde donc le luxe de traîner au lit. Mon bus de retour n'est qu'à 14:30. Je prends mon temps, me balade un peu en ville, déjeune au marché puis entame la marche de retour le long de la voie ferrée pour rejoindre Hydroelectrica. Je regarde une dernière fois le Machu Picchu mais d'en bas cette fois-ci. En chemin, je croise Clément et François qui arrivent de leurs trois jours de trek. Nous échangeons quelques unes de nos impressions puis nous donnons rendez-vous lundi, à Cuzco, pour un debrief complet. 

Le retour en bus est tout aussi beau qu'à l'aller. A mi chemin, nous faisons une pause dans un tout petit village. Une petite fille me saute littéralement dans les bras, me fait un énorme câlin et ne me quittera pas jusqu'à notre départ. 
A 21:30, je suis de retour chez Raoul et peu de temps après dans les bras de Morphée. 

C'est que dimanche, une nouvelle aventure m'attend. Je m'attaque à la vallée sacrée, en solo et en bus local. 
Je commence par prendre un collectivo (bus collectif) en direction de Písac, ville connue pour ses ruines Incas, son marché artisanal et sa messe en Quechua. Je demande à ma passagère de gauche si mon programme est réalisable. À priori, je devrais pouvoir visiter les 4 sites que j'ai sélectionnés. Ils sont tous dans un périmètre de 50km au Nord de Cuzco. 

J'arrive à Písac très tôt. La ville se réveille. Je suis tellement en rade de linge propre que je me trimballe 4kg de linge pensant trouver une laverie à Cuzco avant de prendre le bus. Je trouve mon bonheur à l'entrée de Písac. En 4h, je récupère mes affaires propres et repassées. Et 4h c'est pile le temps qu'il me faut pour parcourir Písac et ses points d'intérêts. Elle est pas belle la vie ?

Je commence par me rendre sur le site archéologique. Pour cela, je traverse la ville et son fameux marché artisanal en cours d'installation, vide de tout touriste. 


Puis je grimpe jusqu'aux ruines situées à plus de 3000m. Il me faut 2h30 pour faire le tour. Le site me plaît beaucoup. Les Incas ont une nouvelle fois investi la montagne sans la défigurer. Il comprend des thermes, des temples, des forteresses et des zones urbaines. Le tout installé sur la crête ou parfois à flanc de montagne. Et au milieu, des cultures en terrasse qui sont encore utilisées aujourd'hui. L'endroit était stratégique pour l'empire car Písac est situé non loin du début de la jungle d'où étaient puisées de nombreuses ressources. On pense également que Písac défendait l'entrée sud de la Vallée sacrée.













Après cette belle visite, il est l'heure de la messe. Et oui, à onze heures pétantes, je me suis rendue à l'église avec les locaux. Je ris toute seule de me retrouver là, au Pérou, un dimanche à l'église, assistant à une messe, en Quechua qui plus est... Les rites sont similaires aux nôtres. Il y a juste beaucoup plus de couleurs dans l'église grâce aux ponchos multicolores portés par les populations locales. 



Je repasse par le marché qui est cette fois rempli de touristes. 

Mon linge est propre, je peux donc me donc continuer mon chemin et me rendre sur le site Inca de Moray. Je misais sur une heure de trajet. Cela aura plutôt duré 2h30-3h... Il faut dire que l'endroit est bien isolé. Je prends d'abord un premier bus qui me mène à Urubamba. De là, on m'indique qu'il n'y a pas de bus direct mais que le bus pour Cuzco s'arrête à Maras, ville la plus proche. Je prends donc mon billet et attends patiemment avec les autres passagers que le bus soit plein. Après 20 bonnes minutes, nous voilà en route. Le bus me pause au bord de la route au croisement qui part en direction de Maras. De là, je n'ai d'autre choix que de négocier avec un taxi pour atteindre Moray. Je réalise à ce moment là que prendre un tour organisé aurait certainement été plus simple et pas forcément plus cher. C'est ça aussi l'aventure ! Et au moins je passe le temps que je veux sur chaque site. 
Me voilà donc entassée à 8 dans un taxi : 2 devant, 4 sur la banquette arrière et 2 dans le coffre. Les taxis sont les seuls moyens qu'ont les locaux pour rejoindre leurs villages respectifs. 
Après avoir traversé le village de Maras, plutôt mignon, avec ses maisons construites en briques de terre, nous repartons dans les montagnes.

Perché à 3500m d'altitude, à 50km au nord-ouest de Cuzco, d'étranges terrasses en colimaçon apparaissent. Moray était en fait un ancien centre de recherches agricoles Inca. Les terrasses ont été creusées en suivant les courbes naturelles du paysage. L'épaisseur des murs emmagasine la chaleur durant la journée et la diffuse la nuit. Grâce à cette méthode, ils ont pu obtenir des microclimats différents (une vingtaine à priori). A mesure que l'on descend et se rapproche du centre il peut y avoir jusqu'à 5 degrés de différence. 
Certains chercheurs pensent même que chaque terrasse produit les conditions climatiques correspondant aux différentes zones écologiques de l'empire Inca. 
Le système d'irrigation complexe permettait de cultiver plus de 250 espèces de plantes. 
On prête souvent aux incas la création des cultures en terrasses ou "andennes". Ils ont en fait seulement perfectionné cette technique dont l'origine remonterait à la civilisation pré-inca Tehuacan.
Les Andes sont ainsi considérées comme le berceau de l'agriculture moderne. C'est par exemple ici que les Incas ont développé la culture de près de vingt espèces de maïs. Ils ne cesseront de m'épater...




C'est accompagnée de deux allemands et d'un argentin que je prends la direction d'une autre ingéniosité Inca: Les salines de Maras. Le taxi nous dépose à l'entrée du village où un chemin de terre plonge dans une vallée de pâturages sur fond de sommets enneigés. Au bout, d'une petite heure de marche, encaissés dans la vallée, des petits bacs suspendus à la montagne apparaissent. De loin, on dirait qu'ils sont remplis de lait. 
Le sel provient d'une source perchée à 3200m qui donne naissance à un ruisseau saturé de chlorure de sodium. Pratique quand on est aussi loin de la mer...
Encore exploitées aujourd’hui, les salines datent de l’époque pré-inca et ont été développées au fil du temps, notamment par les Incas. Aujourd'hui, le site produit chaque année entre 160 et 200 tonnes de sel.
Nous nous baladons au milieu des piscines, de près l'on aperçoit très bien les cristaux de sel. 







Il commence à se faire tard et je suis bien loin de Cuzco... Moi qui pensais avoir le temps de faire un dernier site. Je quitte donc mes nouveaux amis et prends le chemin du retour. Suivant les renseignements glanés auprès des locaux, je traverse les salines et descends jusqu'au fond de la vallée où se trouve le petit village de Pichingoto. Il faut ensuite trouver la grande route où passent les collectivos en direction d'Urubamba puis prendre un bus pour Cuzco. En chemin, je rencontre trois français dont deux villeurbannaises (ma ville de naissance). C'est quand même fou ! Ils rentrent aussi sur Cuzco. Je me joins donc à eux. 
Nous avons bien le temps de faire connaissance puisque le retour est plus long que prévu. En effet, trop contents de ne pas avoir à attendre, nous montons dans le premier bus qui part pour Cuzco. Il s'agit en fait de celui qui fait la grande boucle et qui met plus de deux heures au lieu d'une. C'est pas comme si j'avais fait beaucoup de bus aujourd'hui...

A 20h, je suis contente d'arriver. Je retrouve Raoul et sa maman, de retour de week-end. 
Nous passons la soirée ensemble. 

Le lendemain, j'ai droit à un super petit déjeuner d'adieu à base d'avocat (ils ont énormes et succulents au Perou), et de jambon. Bien différent du petit dej chez nous mais tout aussi délicieux!

En fin de matinée, je retrouve Clément et François. Pendant deux jours, nous allons visiter les moindres recoins de Cuzco et par la même occasion voyager dans le temps. En effet, la ville n'était rien d'autre que la capitale de l'empire Inca, le Tahuantinsuyo (le nombril du monde). Elle comporte donc de nombreux trésors archéologiques datant principalement de l'époque du roi Pachacútec, qui est souvent mis à l'honneur par des monuments ou autre statues. 
On peut encore admirer les murs incas originels dans certaines rues de la ville ou même le temple du Soleil, Qorikancha, lieu le plus sacré de l'empire Inca, de nouveau révélé au monde après le tremblement de terre de 1950. En effet, sur les fondations de ce temple, les espagnols avaient bâti le couvent Santo Domingo, fortement endommagé par le séisme.
Ce fut, en effet, une prise stratégique pour la conquête espagnole. Menés par Francisco Pizarro, ils arrivèrent au Cuzco le 15 novembre 1532.
A partir de ce moment, le tracé de la ville allait beaucoup changer, les espagnols construisant églises, palais et demeures coloniales sur les fondations des anciens édifices Incas.
En 1650, un tremblement de terre détruit une grande partie des constructions coloniales, les murs d'origines Incas ne bougeant pas. Je vous ai déjà dit qu'ils étaient forts ou pas ? ;-)

Cuzco est enfin le théâtre des luttes indépendantistes. Ainsi, en 1572, Túpac Amaru (le célèbre rappeur a pris le nom du dernier empereur Inca, merci Thib pour l'info !), qui avait mené une campagne de rébellion contre les Espagnols, fut exécuté le 24 septembre 1572, avec sa femme, ses enfants et ses principaux partisans. En 1780, Túpac Amaru II (dernier descendant) réclame la liberté pour toute l'Amérique dans un mouvement révolutionnaire qui inspira les luttes indépendantistes ultérieures et qui le convertit en figure mythique pour la reconnaissance des droits des indigènes. Il fut écartelé et décapité en 1781 sur la plaza des arma. Sympa l'ambiance !

Nous commençons donc par le site le plus loin et le plus haut afin de redescendre progressivement vers la ville. Un bus nous dépose donc à Tambomachay connu pour ses canaux et ses fontaines. Il aurait été un centre de culte et d'hommage à l'eau. 


Nous enchaînons par Puca Pucará, "fort rouge" en Quechua, qui servait de poste de garde et de chasse pour l'empire. Les voyageurs pouvaient aussi s'y reposer à l'époque, une sorte d'hostel pour backpackers incas. 

Un chemin de terre sillonne à travers d'autres vestiges sur plusieurs km dont le temple de la lune, peu connu des touristes (en même temps il n'en reste pas grand chose, j'ai oublié de prendre des photos). Nous profitons aussi de jolies vues. 

Nous atteignons ensuite Qenko. Ce site est situé à 6 km de Cuzco et à 3 580 m d'altitude. En Quechua, Qenko signifie "labyrinthe". Il est, en effet, caractérisé par ses canaux en zigzag et ses galeries souterraines. Une immense pierre est placée au centre à la façon d'un autel. Il s'agit possiblement d'un lieu de culte où jadis les Incas adoraient le Soleil et la Lune. 
Il se pourrait même que le grand Pachacútec soit enterré ici. 


A 1km à l'ouest, la forteresse de Sacsayhuamán surplombe Cuzco. Ses trois énormes murs faits de pierres énormes assemblées dans le plus pur style Inca sont impressionnants. Il ne reste plus que 20% du fort, les espagnols ayant démantelé le site afin de construire d'autres monuments en ville. Ils laissaient seulement les pierres qu'ils ne parvenaient pas à transporter... On peut les comprendre, certaines font près de 6 m de haut pour presque autant de large. Je commence à me demander si les incas n'avaient pas aussi repris et perfectionné la recette de la potion magique...
Il y a aussi ces énormes roches parfaitement polies et qui ressemblent à de la pâte à bonbon. Elles servaient d'esplanades pour les cérémonies. Aujourd'hui les enfants se régalent en glissant comme sur un toboggan. 
A l'époque, Cuzco avait la forme d'un puma. Le temple en représentait la tête. 







Construite par l'inca Pachacutec, à la suite de l'attaque de Cuzco en 1438, elle fut finalement achevée par les incas qui suivirent (Tupac Yupanqui, Huayna Capac).
Sous les murs de Sacsayhuaman se joua l'un des derniers épisodes de la conquête du Pérou. En 1536, lors du soulèvement de Manco Inca, les Espagnols qui tenaient le centre de Cuzco furent assaillis de toutes parts par des milliers de soldats incas. Ils réussirent de justesse à conserver leurs positions et tentèrent de desserrer l'étau par une contre-attaque sur Sacsayhuaman qui se solda par un échec : Juan Pizarro, le plus jeune des quatre frères, y fut mortellement blessé.
La bataille donna lieu à l'héroïque épisode du capitaine inca Cahuide, passé à la postérité : alors que les Espagnols assaillaient la tour où il s'était retranché avec plusieurs guerriers, il préféra sauter dans le vide et alla s'écraser au pied de celle-ci plutôt que de se rendre.

D'ici l'on aperçoit le Christ Blanc qui comme à Rio (mais en beaucoup plus petit) semble protéger la ville. 

De retour en ville, après une petite halte encas où pensant avoir commandé une pomme de terre farcie je vois arriver un pauvre épi de maïs et quelques morceaux de fromage (désolée pour la recommandation culinaire Clément), nous terminons notre visite par le fameux couvent Santo Domingo construit sur le cultissime temple du soleil Qorikancha. Le mélange est étrange surtout que récemment ont été rajoutés des parties encore plus modernes tels qu'une énorme baie vitrée et des murs blancs qui gâchent un peu l'ensemble à mon goût. 




Coricancha, en quechua "enceinte de l'or", représentait le lieu le plus sacré de l'empire Inca. Dressé au centre de la capitale, il était le théâtre des cérémonies importantes des souverains : mariages, sacres, funérailles. C'est là que leurs momies étaient conservées, assises sur des trônes en or. 
Il fut le plus vaste et le plus richement orné de son époque : ses grands murs de pierre, en appareillage inca, mesuraient 140 m de long sur 135 m de large. Les chroniqueurs espagnols ont abondamment décrit ses richesses fabuleuses, avant qu'elles ne soient fondues ou éparpillées : le pourtour du temple, aux murs peints en bleu, était orné d'une énorme corniche en or, les autels, les portes, les statues, étaient décorées de planches d'or et d'argent, parfois incrustées de pierres précieuses qui, de jour comme de nuit, reflétaient la lumière du jour ou bien celle des torches.
La porte principale, ornée de motifs d'or et d'argent, s'ouvrait sur un grand sanctuaire. Au-dessus de l'autel, étincelait un grand disque d'or, censé représenter le Soleil. Il était placé de telle manière que les rayons du soleil levant le frappaient et le faisaient resplendir.
À l'arrivée des Espagnols, il fut rasé et pillé de fond en comble. Les plaques d'or couvrant les murs furent arrachées et les momies des anciens Incas profanées. Il ne resta debout que les fondations qui, peu après, servirent d'assise à la construction de l'église et du couvent Santo Domingo.

Quelle journée ! Nous avons bien mérité un bon repas. C'est donc dans un restaurant typique et familial que nous dînons. Je goûte un nouveau plat local : l'alpaga. Il est délicieusement cuisiné et se marie parfaitement avec un bon Malbec péruvien. Et oui figurez-vous que c'est au Perou que les premières vignes sont arrivées en Amérique du Sud. Il y a donc de nombreux cépages qui poussent sur le territoire. Même si mon Malbec préféré reste argentin, le péruvien n'est pas mal non plus. 


Le dernier jour à Cuzco sera plus light mais riche en information puisque nous faisons la tournée des musées. Nous commençons par le Musée Historique Régional qui retrace l'histoire du Pérou dont une bonne partie sur les Incas. Un panneau super intéressant met en parallèle les différentes civilisations selon les régions du monde et les périodes. On réalise alors que l'empire Inca n'a duré que 100 ans et il a accompli tellement de choses. A ce moment là, l'Europe était en pleine Renaissance. 

Nous enchaînons par un énorme déjeuner à l'une des adresses repérées et testées par les garçons. Au repas : un buffet de salade avec un incroyable guacamole, suivi de la patate farcie que je n'ai pas pu avoir la veille et d'une bonne côtelette de porc. En dessert, ce sera cake à la banane. Autant vous dire que nous sortons de là en roulant. 

Et ce n'est pas le musée d'art populaire qui va nous tenir en éveil. A part ses photos anciennes de Cuzco dont une série prise suite aux différents séismes qu'a connus la ville, rien ne nous a vraiment plu. Il est rempli de figurines bizarres représentant des moments de vie de tous les jours (séance chez le dentiste, césarienne, ...). Étrange endroit. 

Le musée suivant est beaucoup plus intéressant. Il est situé dans les sous-sols du temple du soleil Qoricancha et nous en apprend encore plus sur l'empire et son expansion. Pachacútec, a notamment développé un énorme système de routes qui lui a permis d'étendre son pouvoir, d'accéder à de nouvelles ressources, idées et populations.
Il est également présenté en héros dans le dernier lieu que nous visitons. Une tour surplombée d'une statue à son effigie a été construite en son honneur. Il est présenté en fin stratège, visionnaire, dont les travaux ont eu un impact dans de nombreux domaines comme l'architecture, l'agriculture, la religion, l'administration, la politique et les technologies. 





La journée se termine autour de qq bières locales. Je quitte ensuite mes amis afin de prendre le bus de nuit pour Arequipa. Merci Clément et François de m'avoir accompagnée pendant ces quelques jours. on s'est bien marré. 

J'ai adoré ce séjour dans la vallée sacrée à explorer les vestiges de ce grand empire. Après une  page culturelle conséquente que j'ai d'ailleurs prolongée en visitant la ville d'Arequipa. Je viens de rentrer de trois jours en pleine nature dans le canyon le plus profond du monde : celui de Colca. Mais ça, c'est pour la prochaine fois.


Plein de bisous. 


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