dimanche 9 août 2015

Entre nature et culture : Arequipa, Canyon de Colca et lac Titicaca - Perou

Je suis arrivée à Arequipa à 6h du matin mercredi 29 juillet, après un super bus de nuit dans lequel j'ai eu droit au film Jurassik Parc World. Mes capacités à m'endormir n'importe où s'améliorent nettement puisque j'ai bénéficié de 7 bonnes heures de sommeil. 
Arrivée à l'hôtel, le petit déjeuner en terrasse m'attend. Pancakes et jus de fruits frais. Que demander de plus ?? J'aperçois pour la première fois les volcans qui encerclent la ville, dont le fameux volcan Misti encore en activité. Le jour où il se réveille, il représente un vrai danger pour la ville qui se trouve en plein dans l'axe des coulées de lave. 

En pleine forme, j'en profite pour partir découvrir la ville. Tout d'abord, la Plaza de Arma et sa belle cathédrale. 



Je me dirige ensuite vers le Nord où se trouve une merveille architecturale, le Monastère Santa Catarina. Une véritable ville dans la ville dans laquelle je vais passer une heure et demie à découvrir chaque pièce. Fondé en 1570, à peine 40ans après l'arrivée des premiers espagnols à Arequipa, il accueille dès le début des femmes qui entrent au couvent pour devenir des religieuses de clôture abandonnant à jamais leurs familles. 
Les peintures bleues et rouges habillent les alcôves. Les murs sont fabriqués en teuf de lave et sont parfaitement lisses. On se croirait dans une citadelle. Des murs d'enceinte géants permettent de s'isoler de la ville. Les influences des constructions sont bien sûr espagnoles mais aussi indiennes. Le bâtiment a évolué avec le temps et au gré des reconstructions post sismiques (de gros tremblements de terre ont détruit Arequipa à plusieurs reprises). 

La visite permet d'imaginer comment les bonnes soeurs vivaient. Elle commence par le parloir, très sombre, qui était le seul endroit où les soeurs pouvaient communiquer avec l'extérieur, à travers des grilles en bois... Après le patio du silence au rouge ocre, on débouche sur un cloître aux pierres brutes : le cloître du Nociat avec sa chapelle. On accède ensuite aux premiers lieux de vie. Chacune des sœurs avait sa cellule pourvue d'un lit minuscule, d'une petite cour extérieure où l'on trouve parfois un four à bois et des ustensiles de cuisine. Elles étaient connues pour leurs biscuits et gâteaux. 
Le cloître des orangers est tout aussi beau que le premier. Les poutres sont d'un bleu profond qui apaise. La salle des profundis est ici. On y veillait les morts. 








La rue Cordoba est la plus longue du monastère. Elle donne accès à de nombreuses cellules mais aussi à la fabrique d'hosties et à l'oratoire où des cours étaient donnés aux jeunes filles. Au bout de la rue se trouve le lavoir où un petit canal alimente en eau une vingtaine de vasques qui servaient pour le linge. 
Afin de nourrir toute la communauté, le monastère disposait d'immenses pièces qui hébergeaient l'économat, les cuisines et le réfectoire. De nombreux ustensiles et appareils d'époque ont été laissés à leur place donnant vraiment l'impression d'un retour vers le passé. 
Les soeurs disposaient également d'un grand bain avec les auvents pour se changer. Tout près de là, je suis tombée sur la réserve bien cachée de cochons d'Inde dont les locaux sont friands...






Une petite place toute mignonne permet le passage aux salles principales de l'Ordre Dominique et à l'Eglise Sainte Catherine.
La visite se termine par un nouveau cloître, le plus grand, très joli aussi et par une Pinacothèque où sont exposées les nombreuses toiles d'époque retrouvées dans le monastère. 


L'endroit est incontournable si vous aimez les vieilles pierres et les voyages dans le temps. J'ai adoré !

Je me dirige ensuite plus au nord dans le quartier San Lazaro, petite colline résidentielle avec les volcans en arrière plan. En redescendant, vers le sud je tombe sur la place San Francisco et l'église du même nom. Le musée municipal n'est pas très impressionnant. 
Je déjeune avec vue sur la Plaza de Arma. Un ceviche d'abord, puis les tagliatelles au pesto local (tallarines verdse) accompagné comme d'habitude d'un jus de fruits. 
Je reprends ensuite la direction de mon auberge où d'autres édifices croisent ma route. 




Dans l'après-midi, je visite le musée des sanctuaires andins où est exposée la momie Juanita. Cette histoire est incroyable. En effet, des archéologues en mission au sommet du volcan Ampato sont tombés par pur hasard, nez à nez avec une momie en parfait état de conservation. Une éruption à fait fondre le glacier. Le corps est alors sorti de sa tombe et a glissé sur plusieurs mètres se retrouvant posé sur le sol comme s'il attendait qu'on le découvre. 
Après des mois d'analyses, les archéologues vont découvrir qu'il s'agit d'un enfant sacrifié par les incas. 
Juanita avait 14 ans lorsqu'elle est morte. Dès l'âge de 2-3 ans, elle a été choisie pour sa beauté, pour sa pureté. Elle a donc grandi en sachant qu'un jour elle devrait mourir pour aider son peuple. Il y a avait certainement la peur, mais la fierté d'être l'élue et de devenir elle-même une déesse prenait le dessus. 
Les chercheurs soupçonnent qu'à son époque, des éruptions volcaniques menaçaient les incas. Les volcans étaient leurs dieux, les éruptions des signes de leurs colères. Afin de calmer cette colère, le sacrifice suprême était nécessaire. Il fallait leur donner ce qu'il y a de plus beau, de plus pur : des enfants. 
Une délégation partait alors de Cuzco et parcourait les 500km qui les séparaient des chaînes volcaniques proches d'Arequipa. On pense qu'une centaine d'enfants en faisait partie. Seule la moitié survivait au difficile trajet à travers la cordillère des andes. Le périple se terminait par la difficile ascension jusqu'aux sommets situés pour la plupart à plus de 6000m. Des traces de feuilles de coca ont été retrouvées dans l'analyse des cheveux de Juanita. Elle a dû en consommer dès son départ de Cuzco afin de mieux supporter le mal des montagnes. On ne comprend toujours pas aujourd'hui comment les incas ont pu atteindre ces sommets avec le peu d'équipement qu'ils avaient. Rien qu'en voyant leurs chaussures en peau d'Alpaca, on peut se poser des questions...

Une fois en haut le rituel commence. Juanita est habillée avec les tissus les plus précieux puis droguée. Son visage est ensuite recouvert par un voile. 
Afin de trouver la cause exacte de sa mort, il a fallu procéder à un scanner. Les chercheurs pensaient qu'elle était morte de froid mais les résultats révélèrent une fracture du crâne. Les chamans portaient en fait un gros coup sur la tête des enfants afin de les assassiner. Leurs corps étaient ensuite placés dans de petites cavités. Il était parfois nécessaire d'en briser les membres pour que cela rentre. De nombreux objets en métaux précieux comme l'or et l'argent, et des poteries étaient ensuite placés dans les tombeaux. 
Juanita venait d'une famille noble. Ses vêtements en témoignent, tout comme le fait qu'elle ait été retrouvée au sommet du volcan Apato. D'autres fouilles furent faites suite à sa découverte. Deux autres enfants furent trouvés en contrebas. Eux faisaient partie du peuple. 
Vu le bon état du corps de Juanita. Il devait déjà y avoir un glacier à l'époque. Son corps a donc congelé instantanément. Sa peau, ses organes, tout est intact (ce n'est d'ailleurs pas vraiment une momie du coup). On distingue clairement sa main, ses ongles, etc. C'est impressionnant. Seul son visage est abîmé car le voile qui protégeait son visage s'est arraché lorsqu'elle est sortie de sa tombe. Trois jours d'exposition au soleil ont suffit à lui brûler la peau, le cartilage du nez, les lèvres et les paupières.

18 momies d'enfants ont depuis été découvertes sur les différents volcans péruviens. Tous portent les traces du même rituel cruel. On soupçonne beaucoup d'autres sacrifices. La plupart des corps ont dû disparaître avec le temps, abîmés par les diverses éruptions qui ont eu lieu depuis. 
Le fait que Juanita soit en si bon état est un miracle qui a permis de grandes avancées scientifiques sur les modes de vie des Incas. 

Le musée est hyper intéressant. La visite commence par un film retraçant l'expédition qui a permis de trouver Juanita. S'en suit une visite guidée des différentes salles exposants toutes les pièces découvertes avec les momies ainsi que les nombreux résultats des recherches. Ce qui frappe le plus est vraiment le parfait état de tous les objets et tissus. Dans la dernière salle, il fait sombre et frais. C'est ici que repose Juanita. Dans un congélateur entièrement vitré permettant aux visiteurs de l'observer. Elle est assise, les jambes entre les bras. La tête levée comme si elle regardait au ciel. 
Une adolescente qui fait la visite avec moi demande au guide si un jour elle retrouvera une sépulture. La guide ne répond pas vraiment à la question disant que c'est le seul moyen de la conserver. 

Ma journée se termine sur cette histoire incroyable, cruelle certes mais tellement intéressante sur la façon dont vivait ce peuple il y a 500ans. 

Jeudi, je pars pour trois jours dans le canyon de Colca. Il s'agit du plus profond du monde avec 4000m de profondeur à certains endroits. Il est situé au Nord d'Arequipa. 
Un bus passe me prendre à 3h du matin. Nous sommes une quinzaine à faire le périple. Lorsque six étudiants montent à bord habillés de vestes de quart, je pense tout de suite à la Course Croisière Edhec, la course de voile étudiante que j'ai organisée pendant mes études. A la première occasion, je leur demande pourquoi ils portent ces vestes. Ils me confirment qu'ils ont participé à la dernière édition de cette année et qu'ils ont adoré. C'est toujours génial de reparler de cet événement. Le fait de l'avoir tous vécu rapproche énormément. Nous passerons les trois jours suivants ensemble à partager nos souvenirs et nous donnons rendez-vous sur la 50e édition !

L'excursion commence par 4h de route. Après la pause petit déjeuner, nous nous arrêtons au mirador appelé "la croix du condor" où chaque jour, entre 8h et 10h, lorsque les airs chauds commencent à sortir du canyon, il est possible d'observer des dizaines de condors planer au dessus des centaines de touristes agglutinés au bord de la falaise. Malgré la foule, le spectacle est beau. Certains des rapaces nous survolent de très près. Ils sont énormes. Pas de danger, ils sont charognards. Heureusement car la bête est impressionnante !



Nous rejoignons ensuite le début de la randonnée. Le guide nous annonce la couleur : vous avez choisi la rando en trois jours (contre deux), nous avons donc le temps de prendre notre temps. Ce sera, en effet, le trek le plus light que j'ai fait depuis le début du voyage. Nous ne marcherons pas plus de trois heures par jour et bénéficierons de plein de temps pour nous reposer, discuter, jouer aux cartes, en plein milieu du canyon. En effet, nous descendons littéralement à l'intérieur de celui-ci jusqu'à atteindre la rivière Colca qui sillonne au fond du canyon. C'est l'eau qui est à l'origine de sa formation. Elle a laissé d'étranges stries sur la roche qui font penser à un orgue. Nous nous arrêtons une petite heure au bord de l'eau avant de traverser sur l'autre versant du canyon. 




Après seulement 2h de marche, nous arrivons en début d'après midi dans le petit village San Juan de Chucho situé à flanc de falaise dans le canyon. Il est essentiellement composé de pensions familiales dans lesquelles les nombreux touristes randonneurs passent la nuit. Après un déjeuner délicieux, l'après-midi sera calme avec sieste et petite balade dans le village. L'heure de l'apéro sera vite là tout comme celle du dîner puis du coucher puisqu'à 21h tout le monde est au lit. En même temps, il fait nuit noire à 18h et le réveil à 3h du matin a laissé des traces...


Vendredi nous repartons à 8h après de délicieux pancakes bananes. Durant la marche, le guide nous présente un peu la faune et la flore locales. Comme les cochenilles, ces chenilles qu'on trouve sur les cactus et dont le sang sert de teinture pour les vêtements. Ou cette plante dont la sève est utilisée comme pommade pour les maux de ventre. Nous découvrons également le fruit du cactus qui ressemble à du kiwi mais dont le goût est plus acide. Puis le pacay qui se présente comme un gros haricot dont l'intérieur est rempli d'une texture filandreuse blanche assez sucrée. Je goûte également la granadilla, cousine du fruit de la passion. Bref, on se régale avec mère nature. 




La randonnée nous fait traverser quelques villages un peu plus authentiques que celui où nous avons dormi. Les habitants portent les tenues traditionnelles dont le fameux bonnet péruvien. Certains d'entre nous se demandent si c'est pour le folklore.
Nous pouvons observer comment vivent les habitants isolés au milieu d'un canyon. La viande sèche avec le linge. Il n'y a pas de frigo, seul le sel permet de la conserver. Toutes les marchandises sont apportées à dos de mules. Les gens vivent de l'agriculture et du tourisme. 



Au bout de deux heures (au lieu de trois), nous atteignons notre destination du jour : l'oasis de Singalle. Un petit paradis situé au coeur du canyon. Une nouvelle fois rien d'authentique puisqu'il semble que l'endroit ait été créé pour les touristes mais c'est super beau. Au programme, piscine, bronzage et parties de tarot. Seul point négatif : la disparition du soleil derrière les montagnes dès 15h. Cela impliquera un apéro beaucoup plus tôt qu'à l'accoutumée...
La soirée se passe autour d'un feu préparé par notre guide qui nous offre une bouteille de Pisco. Une autrichienne, rencontrée dans la journée, s'occupe de la musique. Sa voix incroyable nous ensorcelle. Les deux cordes manquant à la guitare empruntée à l'hôtel ne l'empêche pas de faire des merveilles. La pauvre est tellement douée que nous la prenons pour un juke-box lui balançant sans relâche tous les titres que nous aimerions entendre. Très bonne soirée !



Le lendemain est un peu plus corsé. Départ à 5h à jeun pour remonter le canyon. Ça pique un peu au réveil, les quelques verres de la veille n'aidant pas mais l'énergie arrive vite. Nous commençons à la frontale même si la pleine lune éclaire assez bien le chemin. Comme nous marchons bien, nous réalisons les 7km et 1000m de dénivelé en deux heures. Nous avons quand même un vomi (je ne citerais pas de nom) et un éboulement à déclarer. En fait, le guide nous apprend qu'un tremblement de terre a eu lieu pendant la nuit vers 4h du matin. Cela correspond bizarrement à l'heure à laquelle je me suis réveillée mais sans savoir pourquoi... L'éboulement qui croise notre route est certainement lié. 


En haut du canyon, nous atteignons le village de Cabanaconde, d'où nous sommes partis le premier jour. Nous dévorons le petit déjeuner qui nous attend. Une autre secousse se fait sentir. Elle est brève nous mettant le doute sur le fait que la terre est vraiment tremblée. Le sud du Pérou est fréquemment touché par des tremblements de terre, de faible intensité la plupart du temps heureusement. C'est ici que se trouvent les volcans les plus actifs du pays. Ils se sont formés par la subduction de la plaque océanique de Nazca située dans le Pacifique et de la plaque du continent sud américain.


Le bus a du retard, les cartes font passer le temps.
La randonnée est terminée mais l'excursion continue. Après une petite heure de route, le bus nous arrête au point de vue d'Antahuilque où la vue sur les terrasses millénaires est à couper le souffle. Certaines terrasses encore utilisées aujourd'hui ont près de 1500 ans. 


Nous rejoignons ensuite les bains thermaux de Colca où une eau à 38 degrés sort naturellement de la montagne avant de rejoindre la rivière. Je m'amuse d'ailleurs plusieurs fois à passer de l'eau glacée de la rivière à celle presque brûlante des bains. C'est excellent pour les muscles. 


Au bout d'une heure de relaxation, nous reprenons la route pour Chivay. Là, un buffet gargantuesque nous est proposé. Comme des affamés, et parce que c'est délicieux, nous mangeons plus que de raison. A la limite du mal être... Voici dans quel état nous sommes avant de reprendre la route ! Heureusement que la suite de la visite est véhiculée...

A peine le temps d'une sieste digestive que le bus s'arrête à nouveau. Nous sommes alors à 4900m d'altitude (plus haut que le Mont Blanc !!), point le plus haut du canyon avec une vue panoramique sur les trois cordillères comprenant les fameux volcans dont j'ai parlé auparavant :
- la Cordillera Volcanica avec le Chucura (5360m), le Chachani (6075m) et le Misti (5825m)
- la Cordillera del Ampato dominée par le volcan du même nom qui culmine à 6288m et au sommet duquel a été découvert Juanita. Cette chaîne comprend également le Sabancaya (5976m) et le Hualca Hualca (héhé) (6025m)
- la Cordillera del Chila très importante pour le continent puisque l'Amazone prend sa source dans ses glaciers. 
Le Misti et le Sabancayale sont les plus actifs et ceux qui représentent le plus grand danger pour les populations. 
La température extérieure est glaciale. Nous remontons vite dans le bus. 




Le dernier stop est en plaine dans la réserve nationale de Salinas y Aguada Blanca. Les populations locales se consacrent à l'élevage d'alpagas et de Lamas pour leur fourrure . Il existe quatre sortes de camélidés au Pérou, le lama et l'alpaga étant les seules espèces domestiquées. Le guanaco et le vicuña sont complètement sauvages. Leur fourrure est beaucoup plus fine. Elle est très recherchée et très chère. Ils ont donc été beaucoup chassés jusqu'à réduire leur population de près de 99%. Aujourd'hui, seules les populations locales ont le droit d'en capturer un petit nombre et ce une fois par année. 
Nous aurons tout de même la chance d'apercevoir des vicuñas plusieurs fois pendant le trajet en bus. 
Les incas se sont amusés à mélanger les races afin d'obtenir des fourrures de textures et de couleurs différentes. Certains spécimens ont des têtes vraiment étranges aujourd'hui. 





Sur les derniers kilomètres nous longeons le majestueux Misti.

En arrivant à l'auberge de jeunesse, j'apprends qu'ils ont oublié de me réserver un lit. Alors que je n'ai qu'une envie, me doucher et me coucher, il me faut changer d'hôtel. Ah.. Les aléas du voyage. Au final, je me retrouve dans un grand dortoir rien que pour moi pour une bonne nuit de sommeil. 

Dimanche je profite de la matinée pour visiter un dernier quartier d'Arequipa. Celui de Yanahuara, beaucoup plus chic et résidentiel. D'ici, on aperçoit parfaitement les volcans Misti et Chachani. Je découvre les picantería que je n'aurai malheureusement pas le temps de tester car je compte prendre mon bus pour Puno en début d'après midi. Dans ces restaurants typiques arequipeña, il est possible de déguster les nombreux plats plus ou moins pimentés de la région. 
Quitte à goûter une spécialité, je penche pour une queso helado (glace au fromage). Cela peut paraître étrange comme concept mais c'est très bon. En revanche, ça n'a pas du tout le goût de fromage. C'est peut être mieux ainsi me direz vous. 



Après avoir fait le tour de la place et de son église, où les représentations de Jésus sont comme dans de nombreuses églises d'Amérique Latine très ensanglantées, je redescends vers le centre en me perdant dans les ruelles. Je croise une course canine assez originale. Je passe ensuite au marché puis pars récupérer mon sac et saute dans un taxi pour le terminal de bus. 





Je n'ai pas acheté de billet et j'ai encore une fois de la chance. Le bus de 13:15 en direction de Puno est plein mais un passager souhaite revendre son billet. Je suis la seule touriste à bord ayant privilégié le bus local pour ce trajet. 

La route est une nouvelle fois magnifique : des chaînes de montagnes, des plaines remplies de lamas et d'alpaga, des lacs géants avec des colonies de flamands roses. Je profite à fond du film qui défile devant moi. Les sept heures de trajet passent assez vite. Je suis maintenant au bord du lac Titicaca. Il faudra attendre le lendemain pour le voir car il fait nuit noire. 


Je m'installe dans ma nouvelle chambre que je partage avec une franco italienne et un mexicain. Nous discutons un moment puis comme ils partent en excursion tôt le matin, la soirée est courte. De mon côté, je prends mon temps le matin. Après une petite balade en ville, je réserve mon séjour de deux jours sur les îles du lac Titicaca puis je me motive pour une visite du site Inca de Sillustani. J'aurais pourtant dû écouter mon corps qui depuis la nuit précédente donnait des signes de faiblesse. J'ai ainsi passé l'ensemble du tour organisé à me tordre de douleur tout en essayant d'écouter le guide super intéressant.



Sillustani est un site funéraire déjà utilisé avant les Incas. Les tombes sont en forme de tours appelées Chullpas. Elles sont faites de pierres volcaniques. Chaque tour est pourvue de plusieurs niches dans lesquelles étaient insérés les corps momifiés en position foetale. 
Il est facile de reconnaître les Chullpas qui datent de l'aire Inca avec leurs pierres parfaitement taillées comme s'il s'agissait des pièces d'un puzzle. Pour les construire, ils utilisaient des rampes comme celle-ci. 


Les tours sont pourvues d'une ouverture à l'Est où le soleil se lève comme recréé chaque jour par la terre mère (Pachamama) selon les croyances ancestrales. 
Sur plusieurs pierres des reliefs sont représentés, comme cette tête de félin. 


Plus loin, les tours blanches étaient réservées aux enfants. 

On trouve des chullpas sur de nombreux sites dispersés dans l'Altiplano, mais celles de Sillustani sont parmi les mieux conservées. Malheureusement le site a été gravement endommagé par El Niño en 98. Afin d'empêcher les tours restées debout de s'effondrer, elles sont aujourd'hui remplies de pierres. 

L'autre intérêt de ce site est son point de vue magnifique sur le lac Umayo et son île complètement plate qui est aujourd'hui une réserve naturelle de protection des vicuñas. L'on aperçoit également les volcans d'où proviennent les pierres qui ont servi à la construction des tours. Je m'assois là un moment toujours le ventre en feu. L'endroit se prête parfaitement à la méditation. 


Avant de rentrer sur Puno, nous nous arrêtons dans un village typique dans lequel est organisée une dégustation de fruits, légumes et autres fromages du coin. A mon grand regret, je ne suis pas en état. Je reste concentrée dans mon coin à attendre que cela passe. 
J'ai juste la force de prendre quelques photos notamment de cet incroyable alpaga au milieu des lamas. Ne vous fait il pas penser à Bob Marley??



De retour à l'hôtel c'est officiel je suis malade. Une bonne vieille maladie du touriste si vous voyez ce que je veux dire. C'est dans ces moments là que l'on regrette de dormir en dortoir. Mon colloc mexicain n'a pas été rancunier et m'a laissé une bonne bouteille de deux litres d'eau le lendemain matin avant de partir. N'étant toujours pas bien à ce moment là, je repousse mon séjour sur les îles d'une journée. C'est plus prudent et je n'ai pas envie de revivre le calvaire du Myanmar, isolée de tout, dans des conditions d'hygiène limite. Je passe donc une journée tranquille à me reposer. Ça fait tellement bizarre de ne rien faire mais j'en profite pour prendre des nouvelles de plein de monde et faire des recherches pour la suite du périple. 

Heureusement le calvaire n'a duré que 24h. J'ai pu partir dès le lendemain pour mon excursion de deux jours sur les îles durant laquelle j'ai découvert les différentes ethnies et même vécu chez l'habitant au milieu du lac Titicaca. 

Un bus est passé me prendre à 8h pour rejoindre le bateau dans lequel je retrouve par pur hasard Remi croisé avec sa copine dans le canyon de Colca. Je fais également connaissance avec Delphine et Romain, deux lyonnais bien sympas avec qui nous passerons les deux jours. Nous sommes plus d'une vingtaine à bord dont beaucoup de touristes péruviens avec qui nous discuterons "voyage". 
Notre guide est très bien. Durant les deux jours, il nous en apprendra beaucoup sur le lac, ses îles et ses traditions. 

Dès le départ les paysages sont magnifiques. Le lac est d'un plat parfait pour une bonne session de wake board. Mais ce n'est pas trop dans les habitudes locales... Sur le lac, à perte de vue, des champs de roseaux enfin plutôt de totora. C'est cette plante qui est utilisée par les habitants de Uros, ces îles flottantes sur lesquelles nous arrivons après une heure de navigation. En fait, on a plutôt droit à un échantillon d'îles spéciales touristes. Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à accoster sur ce petit morceau de paille... Pas très authentique mais sympa quand même. Nous avons droit à une formation : "comment construire ton île flottante?". C'est assez incroyable. Ils utilisent les racines de la totora qui lors de la saison des pluies sont déracinées et se retrouvent à flotter en gros blocs. Ces blocs sont alors assemblés comme un puzzle puis attachés les uns aux autres. Ils sont ensuite recouverts de deux trois mètres de totora. Au bout d'une semaine, l'herbe est sèche mais il faut régulièrement en ajouter : une fois par mois en saison sèche, toutes les deux semaines en saison des pluies. Quelle galère...
Cette plante sert aussi à la construction de leurs maisons et surtout de magnifiques bateaux dont nous serons littéralement forcés à faire un tour en échange de quelques Soles. 










A l'origine, le peuple d'Uros vivait sur la terre ferme. Lorsque les Incas sont arrivés pour les conquérir, ils ont fuit par le lac. Au début, ils vivaient sur des bateaux puis ils ont découvert ces blocs de racines flottants qui leur ont permis de construire leurs iles. 
Du coup, cette communauté ne parle pas Quechua (la langue des Incas) mais Aymara, langue qui vient de Bolivie. 
Il en existerait une centaine aujourd'hui avec 800 habitants. En se renseignant un peu, il semblerait que les vrais Urus aient disparu depuis les années 50 et que ce sont des habitants de Puno qui ont décidé de récupérer les îles laissées à l'abandon pour vivre du tourisme. 

Nous partons ensuite pour trois heures de navigation. Je branche ma musique et me laisse bercer par le paysage. Je suis bien au milieu du lac Titicaca. 
Il s'agit du plus haut lac navigable au monde puisqu'il est perché à 3800m au dessus du niveau de la mer. Son nom signifie puma gris ou puma de pierre selon les langues. Vu du dessus et avec un peu d'imagination, le lac prend la forme d'un puma avec une proie dans la bouche. Mais il faut vraiment de l'imagination... Ce qui est fou, c'est que les incas, qui lui ont donné son nom, n'avaient pas d'images satellites...


Les trois heures passent tranquillement. Le bateau avance tout doucement mais c'est agréable. Nous arrivons sur l'île d'Amantani à l'heure du déjeuner. Nous sommes dispatchés dans nos familles. Je fais équipe avec Rémi et nous sommes accueillis par une charmante petite famille dont l'unique fille a quinze ans. 
Une soupe de quinoa nous attend ainsi qu'une assiette de légumes insulaires : plusieurs sortes de pommes de terre dont de délicieuses patates douces et des haricots plats dont on ne mange que les grains à l'intérieur. Je découvre également la mounia, plante qui se consomme en infusion, mélangée à la coca, et qui est excellente pour les maux de ventre. J'en boirai pendant deux jours, par précaution ;-)
La situation est un peu étrange puisque nous ne sommes que tous les deux installés à table face à la famille qui discute en Quechua assis quasiment par terre. Mettons cela sur la timidité de départ. 



Un peu fatigués, nous nous accordons une petite sieste. C'est qu'il va falloir grimper après. Autant récupérer un peu d'énergie. 
En milieu d'après-midi, nous rejoignons le reste du groupe au stade de foot. Oui oui je vous jure, il y en a un, pourvu d'énormes gradins. J'avais déjà remarqué qu'ils en construisent absolument partout, même au milieu du canyon de Colca...

Notre guide nous présente l'île. Ici les 4500 habitants parlent Quechua. Ils sont divisés en 10 communautés. Chacune a son chef et le tout est coordonné par un maire qui gère aussi les relations avec Puno. Actuellement nous sommes accueillis par la communauté Sankayuni composée de 70 personnes. Un système de rotation est mis en place entre les communautés afin d'accueillir les touristes. Tous les deux mois, elles reçoivent des groupes durant cinq jours. 
A part cela, les habitants vivent principalement de l'agriculture, utilisant les terrasses pré incas qui recouvrent l'île. Patates douces, avas, trigo, quinoa sont les principaux légumes et céréales cultivés ici. Le reste doit être acheté une fois par mois à Puno. 
Il n'y a pas d'élevage ici. Les seuls animaux que l'on voit sont les moutons, pour la laine, et les ânes, pour le transport. Les habitants ne mangent donc pas souvent de viande. En revanche, ils pêchent même si à priori il n'y a plus beaucoup de poissons dans le lac. Les truites qui ont été introduites du Canada ont éradiqué les plus petits poissons. 

Niveau religion, 80% des locaux sont catholiques et 20% avantistes (religion andine). C'est en fait un doux mélange de ces deux religions qui est pratiqué ici car tout le monde participe à la grosse fête qui a lieu en janvier, en l'honneur de pachamama, au temple du soleil situé sur le point culminant de l'île. Des offrandes (feuilles de coca, produits des dernières vendanges) sont faites à la montagne avec un shaman qui lit dans les feuilles de coca pour prédire la qualité des prochaines récoltes. Le tout est fait en musique accompagné de danses traditionnelles durant lesquelles ils utilisent des drapeaux. 
Le but de cette fête est de protéger la vie des habitants de l'île pour l'année à venir. 

Nous montons d'ailleurs au temple afin d'assister à un magnifique coucher de soleil sur les montagnes péruviennes. Mais d'en haut, on aperçoit aussi la Bolivie dont les sommets enneigés sont tout aussi magnifiques. Il y a notamment la fameuse cordillère royale dont le point culminant est le Nevado Illimani, symbole de La Paz. Avec ces 6462m d'altitude, il est visible de très très loin.




Nous rentrons ensuite à la lampe frontale pour dîner. Au menu, soupe de maïs (j'aurai jamais mangé autant de soupe mais qu'est-ce que c'est bon!), riz au petit légumes. J'aide un peu en cuisine puis nous nous régalons et discutons un peu plus avec la famille mais toujours pas à la même table. Je pense qu'ils n'en utilisent jamais en fait. 

La soirée est ensuite folklorique, dans tous les sens du terme puisque nous voici revêtus des tenues traditionnelles. Cela faisait longtemps que l'on ne m'avait pas habillée... Il faut dire qu'il y en a des couches : deux jupes bien épaisses et colorées, un chemisier brodé, deux ceintures ultra serrées sous la poitrine et un châle pour recouvrir les cheveux. Je suis magnifique !
Heureusement que tout le monde est dans le même bain... 
Pour les hommes c'est poncho traditionnel. Pas mal non plus au niveau du ridicule. On a tous bien rigolé. Surtout qu'il a ensuite fallu danser pendant plus d'une heure et autant vous dire que la danse et la musique (à base de flûte de pan comme vous pouvez l'imaginer) sont extrêmement répétitives. Les musiciens nous ont quand même joué la Bamba pour diversifier un peu.
Le père de famille m'a quasiment invitée à chaque chanson. En effet, la danse commence en général à deux puis se termine en énorme farandole. Nous nous sommes bien amusés même si à 21h30 tout le monde était content d'aller se coucher. 



Jeudi, réveil à 5h30 pour assister au lever de soleil sur les montagnes boliviennes. Pas mal non plus au niveau des couleurs. Nous avons la chance, de pouvoir y assister depuis notre chambre sans avoir à sortir des 6 couvertures super lourdes qui nous ont tenu bien chaud pendant la nuit. 



S'en suivent des pancakes au petit déjeuner, avant de rejoindre le bateau. Nous quittons notre famille d'accueil pour visiter une autre île, située en face, à une heure de bateau. Il s'agit de l'île de Taquile. Nous y passerons la matinée. Les paysages me font penser à la Corse. Les habitants semblent plus riches que sur Amantani. Des tours à la journée sont organisés ici. Il y a donc plus de touristes qui passent. Les locaux vivent également de l'agriculture et du tissage même s'il leur faut acheter la laine à Puno. 







Pour le déjeuner, nous avons droit à une soupe de quinoa et à un excellent filet de truite du lac. 
Notre guide nous présente les traditions locales comme ce bonnet qui permet de connaître l'état civil des hommes. Celui des célibataires est rouge et blanc quand les hommes mariés en portent un bariolé. Ils portent également un sac qui contient des feuilles de coca et lorsqu'ils croisent un autre homme, ils ne se serrent pas la main mais s'échangent des feuilles. Cette pratique est assez répandue dans les andes. 
Pour les mariés, il n'y a pas d'alliance mais la femme fabrique, pour son futur epoux, une ceinture avec ses mèches de cheveux et de la laine d'alpaga. 
Afin de reconnaître les hommes de loi, comme les policiers, ces derniers portent un bonnet péruvien très coloré avec par dessus un chapeau en cuir. Ça c'est du style !
Nous aurons enfin droit à une démonstration de fabrication de shampoing à base de plante par un charmant jeune homme célibataire, comme le dit son bonnet.


Il est ensuite temps de rentrer. Nous rejoignons le bateau en profitant une dernière fois du paysage puis atteignons Puno en trois heures. 

Ma dernière journée au Pérou se termine autour d'un bon dîner en compagnie de Delphine et Romain. Je goûte à nouveau l'alpaga ainsi que le cochon d'inde bien mieux cuisiné que la dernière fois. Le tout accompagné d'un délicieux cabernet sauvignon chilien. 

J'ai vraiment adoré ce pays dont les diversités géographiques et climatiques ont obligé les peuples à faire preuve d'une incroyable ingéniosité pour survivre. Les incas ont réussi (par le sang bien sûr mais réussi quand même) à mélanger les ethnies et à réunir toutes leurs connaissances afin de créer un empire immense dont les infrastructures et certaines pratiques brillantes sont encore utilisées aujourd'hui. 
Je repars encore plus riche en images et surtout en connaissances. 
J'ai également découvert un peuple généreux, super accueillant, et toujours prêt à aider. Enfin la diversité gastronomique n'a rien à envier à la France et ça pour moi, vous l'aurez compris, c'est très important ! ;-)

J'ai depuis quitté le Pérou avec un départ vendredi à 6h pour la Bolivie. Depuis le bus, j'assiste au lever du jour sur le lac Titicaca. La lumière est magique !
La majorité du lac (55%) appartient au Pérou mais il parait que c'est en Bolivie qu'il est le plus beau. Je compte donc bien aller vérifier par moi même... 

Plein de bisous. 



  

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